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plaque sensible se réduisent à un groupe presque monochromatique, circonstance qui contribue beaucoup à la netteté de l’image. Les épreuves que l’on obtient maintenant à l’observatoire de Meudon ont un diamètre de 30 centimètres 1/2 ; le temps de pose n’est qu’une faible fraction de seconde. La préparation du collodion et le développement des clichés sont l’objet de soins tout particuliers. « Les images solaires, dit M. Janssen, demandent des procédés photographiques d’une très grande perfection ; ici les plus petits défauts sont révélés impitoyablement, et, comme les détails à mettre en évidence sont d’une délicatesse extrême, il faut que la couche soit d’une finesse et d’une pureté extrêmes. » Grâce à toutes ces précautions, la constitution de la photosphère du soleil cessera peut-être bientôt d’être un mystère pour nous.

On remarque d’abord une fine granulation générale qui couvre toute la surface du soleil ; les grains, plus ou moins arrondis, ont des diamètres qui varient de quelques dixièmes de seconde à 3 et 4 secondes. Le pouvoir éclairant de ces élémens granulaires est très inégal, sans doute parce qu’ils sont situés à des profondeurs très différentes : les élémens les plus lumineux n’occupent qu’une petite fraction de la surface de l’astre. Mais le résultat le plus curieux que révèle l’inspection de ces images, c’est que la photosphère est divisée en une multitude de compartimens, à contours arrondis ou polygonaux, dont les dimensions atteignent quelquefois une minute et plus (le diamètre du disque entier est d’environ 32 minutes). Dans les intervalles qui séparent ces figures, les grains sont nets, bien terminés ; « dans l’intérieur, ils sont comme à moitié effacés, étirés, tourmentés ; le plus ordinairement même, ils ont disparu pour faire place à des tramées de matière qui remplacent la granulation. » On dirait que, dans ces espaces, un bouillonnement violent a brassé et confondu les élémens granulaires. C’est une nouvelle confirmation de ce fait, que l’activité de la photosphère est toujours très grande, même lorsqu’il n’y a pas de taches.

L’Annuaire du bureau des longitudes pour 1878, qui vient de paraître, renferme une épreuve obtenue par M. Janssen le 10 octobre dernier, et grandie trois fois, où l’on reconnaît très bien les détails dont il vient d’être parlé. Ce qui empêche de constater l’existence du « réseau photosphérique » par l’observation directe, c’est que les forts grossissemens restreignent beaucoup le champ des lunettes ; en examinant au contraire une épreuve photographique avec une loupe qui embrasse une certaine étendue de l’image, on voit tout de suite que les parties à granulation distincte dessinent des courans qui circonscrivent les espaces où les grains sont effacés. On aperçoit aussi, entre les granulations, des points