marchands, mais entre particuliers. Toutefois notre grand XVIIe siècle résista encore par la voix de jurisconsultes autorisés aux nécessités du commerce et de l’industrie naissante, Saumaise, Donnât, d’Aguesseau et plus tard Pothier lui-même combattaient pour la gratuité du prêt, alors que Montesquieu reconnaissait en termes discrets la validité de l’intérêt. C’est à l’école économiste du XVIIIe siècle qu’il appartint d’inaugurer formellement la doctrine que l’assemblée constituante a sanctionnée et qui se résume dans l’article 1905 du code civil : « Il est permis de stipuler des intérêts pour simple prêt, soit d’argent, soit de denrées ou autres choses mobilières. » Néanmoins l’autorité ecclésiastique ne se rendit pas sans combat, et, comme le dit M. Troplong, « la sécularisation des usures ne fut pas mieux accueillie que ne l’avait été dans d’autres temps la sécularisation de la justice, de l’enseignement, et de toutes les libertés gallicanes. » Jusqu’à une époque assez récente, il y eut doute dans la direction adonner aux consciences catholiques. Des confesseurs refusaient l’absolution aux pénitens qui ne consentaient point à restituer l’intérêt perçu sur les prêts : en 1822, sous le règne de Pie VII, la cour de Rome dut intervenir entre une demoiselle de Lyon et son confesseur trop rigide ; elle décida que la suppliante pouvait être absoute sans rien restituer, pourvu qu’elle promît de se conformer aux décisions ultérieures qui émaneraient du saint-siège. La même question fut encore posée au pape Pie VIII dans des circonstances plus solennelles, et le débat se termina par le recours formel à une célèbre encyclique du savant pape Benoît XIV, qui dès 1745 avait posé les bases de l’accord futur entre la loi civile et la loi religieuse. Sous la restauration enfin, le cardinal de la Luzerne publia des conclusions entièrement favorables aux prêts à intérêt, et de nos jours le cardinal Gousset, archevêque de Reims, les a confirmées de la manière la plus explicite dans sa théologie morale à l’usage des curés et des confesseurs.
A. côté de la légitimité du prêt à intérêt, proclamée par la loi civile et respectée par la loi religieuse, il convient, pour préciser l’état de la question, de rappeler que notre code contient une limite à cet intérêt : contrairement à l’avis des économistes, à l’opinion du plus illustre d’entre eux, Turgot, à la fin du siècle dernier, l’assemblée nationale, par la loi des 3 et 12 octobre 1792, avait fixé le maximum du prêt à 5 pour 100. La loi de 1807 a maintenu ce même taux pour le prêt en matière civile et l’a élevé à 6 pour 100 en matière commerciale ; c’est encore celui qui prévaut aujourd’hui. Trois articles du code civil résument donc toute la législation actuelle : l’article 1905 établit la légitimité de l’intérêt dans les prêts d’argent, de denrées ou autres choses mobilières ; l’article 1907 qualifie l’intérêt de légal ou de