fait complice de seize assassinats commis contre les protestans et traça de la nuit du 19 août le plus sinistre tableau, à travers lequel circulait un tombereau trois fois chargé de cadavres. Depuis, les historiens se sont emparés de ces assertions, les uns pour les affirmer, les autres pour les contredire. Des électeurs protestans ont déclaré qu’ils avaient voté librement ; d’autres, que l’accès du scrutin leur avait été interdit. La vérité est entre ces affirmations contraires.
Dans les huit jours qui précédèrent et suivirent les élections, douze individus moururent de mort violente, onze, le 19 août, — ceux dont nous avons parlé, — et un le 25, l’abbé Desgrigny. Ce dernier seul était électeur ; c’est même en revenant de Nîmes, où il s’était rendu pour voter, et en rentrant chez lui, à la campagne, qu’il fut frappé par une main inconnue. Aucun électeur protestant ne périt. Il est cependant difficile de croire que tant de sang versé par des mains royalistes n’ait pas eu pour résultat de retenir dans leur retraite ceux qui se croyaient menacés. Comment expliquer d’ailleurs que, sans motifs avouables, sans provocation, de si nombreux crimes aient été commis le même jour, quand on espérait que la période des réactions sanglantes était close ? N’est-on pas en droit de prétendre que les scélérats contre lesquels l’autorité n’osait sévir trouvèrent un prétexte dans l’approche des élections pour ajouter à leurs précédens forfaits ceux de la nuit du 19 août, et que dans la Gardonnenque, où les protestans étaient en majorité, où la présence des réfugiés de Nîmes et d’Uzès entretenait une extrême fermentation, l’abbé Desgrigny tomba sous les coups d’une réaction, hélas ! trop naturelle ? L’étude impartiale des récits et des documens contemporains enlève toute vraisemblance à une autre appréciation.
Tandis que ces événemens se déroulaient dans Nîmes, la petite ville d’Uzès, à quelques lieues de là, était aussi le théâtre de tragiques péripéties. Plus rapprochée que Nîmes des communes dans lesquelles la population protestante est en majorité, elle ressentait plus vivement le contre-coup de leur agitation, qui se traduisait, nous l’avons dit, par des rassemblemens qu’on accusait le général Gilly d’avoir formés. En outre, Uzès avait aussi son terroriste. Il se nommait Jean Graffand et ne tarda pas à être désigné sous le sobriquet de Quatretaillons, par allusion au bandit nîmois dont il surpassa la cruauté. Ancien soldat, il avait quitté le service en 1810, était devenu garde champêtre dans l’une des communes de l’arrondissement d’Uzès, puis garde des eaux et forêts. Volontaire dans