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matérielle. Alors Tarase convoqua, non à Constantinople, ville libérale, mais à Nicée, un concile où ne furent appelés que les prélats réactionnaires et où les autres furent remplacés par des supérieurs de couvent et par des religieux notables. Ce concile cassa tout ce que celui de 754 avait fait et donna une sorte de force morale à la restauration. Bientôt les légions d’Asie se « prononcèrent, » et exigèrent qu’Irène cédât le pouvoir à Constantin, devenu majeur ; cette mère alors creva les yeux à son fils et envoya les légions, trop peu nombreuses, se faire exterminer par les Bulgares. Maîtresse absolue, elle rendit au parti monacal les finances, l’armée, l’enseignement et l’église. La restauration dura vingt ans. Cette femme allait peut-être épouser Charlemagne lorsque, le 31 octobre 802, les modérés et les radicaux agissant de concert, elle fut déposée et reléguée dans Lesbos.

Nicéphore, qui fut élevé au trône, avait dirigé les finances comme grand-logothète. Ami de la réforme, dont il séparait d’ailleurs la question religieuse, il réorganisa d’après les principes de Léon III le trésor public, l’administration et l’armée, et sut contenir les Bulgares ; mais il périt dans une expédition contre eux. C’est son troisième successeur, Léon V, qui leur infligea en 814 la défaite de Mésembria, dont ils se souvinrent pendant cent ans. Ce prince arménien, l’un des plus illustres empereurs d’Orient, sanctionna toutes les institutions nouvelles, éloigna du gouvernement le parti clérical, et « introduisit dans l’administration cet esprit d’ordre et d’honnêteté qui inspira tous les iconomaques. » Quoique modéré, il s’aperçut bientôt que toutes les concessions faites par ses successeurs avaient été stériles ; il en revint donc à la réforme radicale, appliquée même à l’église. Un nouveau concile annula les décrets du précédent et rétablit ceux du concile de 754 ; on réforma la liturgie, on changea le système d’instruction, et l’on imposa aux écoles des livres nouveaux en harmonie avec les principes de la révolution. Lorsqu’en 820, trahi par un ami, par Michel le Bègue, un des chefs de l’année devenu l’agent du parti clérical, Léon V eut péri assassiné, cet usurpateur professa l’indifférence sur toutes les questions de la réforme et ne satisfit personne ; il ne fit qu’accroître le désordre moral dans l’empire. Son fils Théophile reprit avec une énergie quelquefois fougueuse l’œuvre de Léon V ; mais quand il mourut en 842, son fils étant mineur, Théodora, sa veuve, s’appliqua, comme autrefois Irène, à détruire tout ce qu’avaient fait les réformateurs. Un concile, presque entièrement composé de moines, déposa le patriarche libéral Jean Grammaticos, l’excommunia et mit à sa place le moine Méthodius ; presque tous les évêchés furent occupés par des moines. Le 19 février, on