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apostoliques, Pie IX ne faisait guère que changer un nom ; évêques, archevêques, patriarches, les chefs, des nouveaux diocèses n’étaient, sous un titre comme sous l’autre, que des vicaires du souverain pontife. Avec le nombre des sièges épiscopaux s’accroissait le nombre des sièges à la nomination directe du Vatican, si bien qu’aujourd’hui les évêques choisis avec le concours des gouvernemens et des peuples sont en minorité dans l’épiscopat. Le libéralisme contemporain et la chute même du pouvoir temporel ont indirectement contribué à cette grave révolution, l’Italie nouvelle ayant jusqu’ici abandonné au Vatican le choix de ses nombreux évêques, tandis que les imprudens avocats de la séparation de l’église, et de l’état travaillent à supprimer partout, au profit du césarisme romain, les derniers vestiges de l’élection épiscopale et des libertés ecclésiastiques.

Comme le collège des cardinaux, l’épiscopat catholique n’est déjà plus qu’une émanation de l’autorité pontificale. Les anciens collègues de l’évêque de Rome sont devenus ses délégués. Des intendans ou des préfets ecclésiastiques, de simples administrateurs de diocèses, voilà ce que pour la plupart sont aujourd’hui les évêques catholiques. Le premier concile devait naturellement dévoiler à tous les yeux l’importance d’une telle métamorphose. Avec un épiscopat ainsi transformé, le triomphe de l’infaillibilité romaine était assuré d’avance : les évêques des pays les plus libéraux, des pays les moins catholiques, allaient en 1870 se montrer les plus ultramontains. La papauté ne pouvait rassembler cet épiscopat, si différent de l’ancien, sans en obtenir la reconnaissance de toutes ses prétentions. Et de fait, en abdiquant ainsi aux mains du saint-siège, le concile ne faisait au fond que sanctionner le changement survenu dans la constitution intérieure de la hiérarchie. Le siège dont tous les autres recevaient leur autorité, dont toute juridiction découlait, devait être proclamé infaillible par ceux qui tenaient tout de lui. Du domaine de la hiérarchie et de la discipline, la centralisation absolutiste devait logiquement passer dans le domaine de la foi et du dogme. C’en était fait de la vieille aristocratie épiscopale, l’église avait virtuellement cessé d’être une monarchie tempérée, pour devenir un empire autocratique.


V

Le mode de recrutement de l’épiscopat permettait à la papauté de promulguer tel dogme dont il lui plairait de doter l’église. C’était la plus haute prérogative que pût revendiquer le saint-siège. Un pape comme Pie IX ne pouvait manquer d’en user : il a enrichi