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presque tous les enfans arrêtés pour vagabondage ont sur la conscience quelque petit larcin. Ce chiffre est le seul qui puisse être donné avec un caractère de certitude ; mais il ne faudrait pas croire qu’il embrasse l’effectif complet des enfans vagabonds ou mendians. D’abord n’oublions pas que ce chiffre ne représente qu’une moyenne annuelle, et que chacune des années précédentes a fourni un contingent à peu près égal. Ces contingens ne doivent pas s’ajouter les uns aux autres, car un grand nombre d’enfans arrêtés en 1877 l’ont été déjà en 1876 ou 1875, et ainsi des autres années. Dans quelle proportion ? Il faudrait, pour l’établir avec certitude, des recherches matérielles presque impossibles à opérer, et toutes les évaluations qu’on peut faire sont absolument conjecturales. D’un autre côté, en plus de ces contingens du vagabondage permanent, on ne saurait méconnaître l’existence d’une assez nombreuse population d’enfans dont les mauvaises habitudes ne sont point aussi profondément enracinées, qui échappent presque entièrement à la main de la police, mais qui vivent habituellement en dehors de l’école et souvent de la famille, demandant un peu au hasard et à la flânerie, plutôt qu’à la mendicité et au vagabondage proprement dit, l’emploi de leurs journées et les ressources de leur existence. Ici encore il faut s’abstenir de toute évaluation, car les chiffres n’ont de valeur et d’intérêt qu’autant qu’ils sont positifs, et on ne peut procéder que par renseignemens très généraux. Dans un rapport fréquemment cité, l’habile directeur de l’enseignement primaire dans le département de la Seine, M. Gréard, a évalué aussi rigoureusement que possible le nombre des enfans de six à quatorze ans qui en 1875 ne fréquentaient aucune école et ne recevaient aucune instruction dans leur famille : ce chiffre s’élevait en nombres ronds à 18,000 pour Paris, à 1,500 pour l’arrondissement de Saint-Denis, à 300 pour l’arrondissement de Sceaux, soit au total près de 20,000. Il faut noter, à l’appui de ce que je viens de dire du contingent fourni par ces enfans au vagabondage, que les arrestations d’enfans opérées dans l’arrondissement de Sceaux, où presque tous fréquentent l’école, sont très rares, tandis qu’un grand nombre d’enfans arrêtés ont leurs parens domiciliés dans les communes de Pantin, Aubervilliers et Saint-Ouen, qui appartiennent à l’arrondissement de Saint-Denis. Ce serait cependant aller trop vite en besogne que de ranger dans la classe des vagabonds tous ces enfans qui ne fréquentent pas l’école. Beaucoup en effet sont retenus à domicile par la misère de leurs parens qu’ils aident dans les soins du ménage, ou employés à des petites industries. Cependant on ne saurait méconnaître qu’un certain nombre ne soit aussi à l’état oisif et errant, c’est-à-dire exposé à toutes les tentations de la rue. Dans