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auxquels Florence payait, pour le même capital prêté, 2,070,000 livres ; il bénéficierait d’une différence d’intérêt d’environ 2 pour 100. De plus, pour parfaire la somme, une réduction de 500,000 livres serait accordée, jusqu’à nouvel ordre, sur la taxe d’abonnement de 2,300,000 livres, à laquelle avait été fixée la part afférente au trésor dans les revenus de l’octroi florentin.

Peu de semaines après la publication de ce rapport, M. Depretis quittait les affaires ; il était remplacé par un autre des chefs de la gauche, M. Cairoli. Entre temps, la crise florentine devenait de plus en plus aiguë ; à peine M. Cairoli avait-il formé son cabinet, Florence lui adressait un suprême appel. Que croyez-vous que fit M. Cairoli ? Sans doute, direz-vous, il s’appuya sur les travaux de la commission qui venait de terminer son œuvre, il prit-texte de ses conclusions, pour proposer et faire voter d’urgence une loi de réparation et de secours. Vous n’y êtes pas : c’est ainsi peut-être que les choses se seraient passées en France s’il s’était agi d’empêcher la faillite de Marseille ou de Lyon, de Lille ou de Bordeaux ; mais les choses ne vont pas si vite en Italie. Pendant que Florence aux abois ajournait à trois mois toutes ses échéances, le chef du cabinet se bornait à demander la nomination d’une nouvelle commission d’enquête. Il est vrai que la précédente avait été administrative ; celle-ci serait parlementaire[1] ! La commission était nommée ; avant même qu’elle eût déposé son rapport, la faillite définitive était déclarée. Il n’est plus temps, quoi que l’on propose et quoi que l’on fasse, d’épargner à Florence la honte dont elle était menacée depuis plusieurs années.

La commission parlementaire évalue, dit-on, à 145 millions de livres la dette de Florence. Nous n’avons pas à contrôler ici ses dires, ni à discuter les résolutions qu’elle ne peut manquer de soumettre aux chambres. L’opinion semble enfin s’être émue ; presque toute la presse manifeste un vif désir de voir l’état faciliter la liquidation de Florence et sauvegarder, dans une certaine mesure, les intérêts de ses créanciers. Mieux vaut tard que jamais, dit le proverbe ; c’est pourtant bien tard. Florence méritait mieux. Pendant les pénibles années où elle se débattait contre des difficultés écrasantes et où elle s’imposait les plus lourdes charges pour tenir ses engagemens, Florence méritait de trouver auprès du gouvernement

  1. En réalité, cette enquête est la troisième. Au mois d’avril 1877, un premier examen de la situation et des remèdes qu’il convenait d’y apporter avait été fait par l’un des financiers les plus capables de l’Italie, le commandeur Petitbon, et cet examen avait abouti à un premier rapport dont on trouvera l’analyse dans la brochure de M. Mari. Celle-ci, qui nous arrive au moment où nous mettons sous presse, paraît exposer la question avec beaucoup de sens, de mesure et de fermeté, tout à la fois.