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Page:Revue des Deux Mondes - 1878 - tome 28.djvu/412

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naturelle des provinces[1]. Il est à noter aussi que certaines des assemblées territoriales, surtout dans la région du nord-ouest, ont de grandes difficultés à faire rentrer les impôts qui leur reviennent. Le zemstvo de Pétersbourg est du nombre, et, dans quelques districts de ce gouvernement, les arriérés, en s’accumulant, ont parfois dépassé 100 pour 100 du revenu.

C’est la contribution foncière qui fournit aux zemstvos la plus grande partie de leurs ressources ; on se demande naturellement comment se distribuent les charges entre les deux classes dominantes du zemstvo, et entre les deux modes de propriétés personnifiés dans ces deux classes. La répartition des taxes entre les paysans des communes et les propriétaires à titre individuel varie beaucoup suivant les régions et les provîntes. Dans la plupart des gouvernemens, la propriété communale reste encore plus imposée que la propriété personnelle et héréditaire. Des 17 millions de roubles fournis en 1875 à la caisse des zemstvos par les immeubles non bâtis, la plus grande moitié, 9 millions 1/2, était payée par les paysans, qui pourtant ne possédaient guère que le tiers des terres imposées, soit 75 millions de déciatines[2]. La propriété individuelle, les terres de l’état et des apanages de la famille impériale, qui couvraient ensemble plus de 126 millions de déciatines, ne payaient qu’une contribution d’un peu plus de 7 millions.

À ne prendre que les chiffres et la surface des terres soumises à la taxe, il y aurait là une énorme disproportion, les zemstvos feraient porter double charge à la classe la plus pauvre, aux paysans, au profit de leur ancien seigneur, au profit surtout de la couronne. Cette choquante anomalie ne s’explique pas seulement par la prépondérance de la noblesse dans la plupart des assemblées provinciales, elle s’explique aussi en partie par la nature et la qualité des immeubles imposés. En règle générale, les terres des paysans sont des terres arables, partout en culture régulière ; les biens de la noblesse et surtout les biens de l’état comprennent

  1. Voici comment se classaient, par ordre d’importance de leurs budgets des dépenses, les trente-deux gouvernemens alors en possession d’assemblées territoriales.Après Perm, qui dépensait 2,063,000 roubles, venaient Viatka (près de 1,600,000 roubles), Saratof (près de 1,200,000), Tambof (1,100,000), Moscou (1,045,000), Kherson (1 million). Poltava, Voronège, Koursk et Kharkof approchaient du million, Khazan dépassait encore 800,000 roubles ; sept gouvernemens, dont celui de Tauride, dépassaient 700,000 ; sept également, dont Saint-Pétersbourg, dépassaient 600,000 ; cinq restaient au-dessus de 500,000. Deux seulement tombaient au-dessous de ce chiffre, Smolensk avec 459,000 et Olonets avec moins de 300,000 roubles.
  2. La déciatime russe vaut 1 hect. 9 ares. Il ne faut pas perdre de vue que les zemstvos n’étaient pas institués dans tous les gouvernemens. Cette répartition des terres n’embrasse donc point toute la surface de l’empire.