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s’évanouirent comme par enchantement. Surpris au mouillage qu’ils occupaient depuis le commencement de l’automne, les Perses ne se soucièrent pas de tenter de nouveau la fortune sur mer. La carène de leurs vaisseaux était chargée d’herbes, leurs équipages, recrutés dans l’armée de terre, étaient de médiocres rameurs. A peine Léotychide et Xantippe eurent-ils jeté l’ancre dans les eaux de Samos qu’ils virent l’ennemi appareiller à la hâte, se soustraire à leurs projets d’attaque par la fuite et gagner, en faisant force de rames, le continent. Entre Éphèse et Priène, à peu de distance du promontoire de Mycale et presque en face de l’île de Samos, s’étend une vaste plage formée par les alluvions du Gison et du Scolopéis. Les Perses y tirèrent à sec leurs vaisseaux et les entourèrent d’un mur de pierres, couronné de palissades. Quant aux navires phéniciens, ils furent autorisés à retourner en Syrie. Un ennemi qui refuse le combat encourage toujours à le poursuivre, car il fait ainsi l’aveu de sa faiblesse. Les Grecs ne tardèrent pas à être signalés du promontoire de Mycale. Leurs 110 vaisseaux pouvaient mettre à terre près de 20,000 hommes et demeurer encore sous une garde suffisante. Les équipages des Perses, soutenus par une nombreuse infanterie, essayèrent vainement de s’opposer à la descente. Avec des vaisseaux qui peuvent aller s’échouer à la plage, les préparatifs d’un débarquement sont tout faits. Le navire devient lui-même une sorte de fortification passagère. Le combat de Mycale fut, comme plus d’un combat de pirates normands, un combat d’amphibies. Les marins vidèrent ce jour-là leur querelle sur la bruyère. La flotte des Perses devint la proie des flammes, elle avait du moins été vaillamment défendue. Plus d’un guerrier grec s’était, le soir venu, acheminé vers le Valhalla où errent Agamemnon et Achille.

Les Athéniens juraient volontiers, comme les Vikings, « par leur bateau et par leur épée. » Les Lacédémoniens se trouvaient dépaysés sur mer. Quand ils eurent brûlé les navires des Perses et bouleversé les remparts qui abritaient la flotte, ils ne songèrent plus qu’à revoir leurs montagnes. Ils voulaient emmener en Grèce les colons ioniens et abandonner l’Ionie aux barbares. Les Athéniens s’opposèrent vivement à cette transplantation. Les Péloponésiens n’avaient, selon eux, aucun droit de s’occuper des colons d’Athènes. La protection jugée impossible, ils la prendraient à leur compte. Les Athéniens tinrent en effet parole. Grâce à leurs efforts, grâce à leur persévérance admirable, au bout d’un an de siège Sestos retombait aux mains de la Grèce. Voilà ce qui eût pu réellement faire mourir la mère de Xerxès, la vénérable Atossa, de douleur. La reine Marie Tudor n’y eût pas résisté. La prise de Sestos, c’était la fin de la guerre médique.

Dans les récits des anciens, il n’est jamais question du mal de