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cas de conflit avec la Grande-Bretagne la Russie se flattait d’improviser. De même que les zemstvos, les municipalités ont ainsi vu du fait de la guerre leurs dépenses grossir en même temps que leurs ressources diminuer.

En venant inopinément renverser le frêle équilibre des budgets municipaux, la nouvelle guerre d’Orient va faire remettre à l’étude une question déjà souvent agitée dans les grandes villes, mais qui, sans l’impulsion de la nécessité, eût pu traîner encore longtemps dans d’interminables discussions théoriques ; je veux parler de la réforme des taxes municipales. A la suite de la guerre, les villes auront, tout comme l’état, à remanier leur système fiscal.

Ce qui caractérise aujourd’hui le budget des municipalités, c’est que la plus grande partie de leurs recettes provient de l’impôt direct. Les taxes indirectes, les taxes de consommation, qui jouent le principal rôle dans nos budgets municipaux, n’ont encore dans le budget des villes russes qu’un rôle nul ou accessoire. Ce seul fait explique déjà en partie l’infériorité de leurs ressources et le peu d’élasticité de leurs revenus. Beaucoup des impôts existant aujourd’hui n’ont dans la capitale au moins qu’un caractère provisoire. Lors de l’introduction du nouveau statut municipal à Saint-Pétersbourg, il avait été décidé que les anciennes contributions prélevées au profit de la ville seraient temporairement maintenues pendant une période de quelques années. Ce délai écoulé, l’administration municipale, instruite par l’expérience, devait décider lesquels de ces impôts méritaient d’être définitivement adoptés, lesquels devaient être abrogés ou remplacés. La douma pétersbourgeoise n’a point perdu de vue ce grave problème, elle en a durant les dernières années préparé la solution sans s’être encore arrêtée à aucun parti. Voilà comment s’est maintenu un système fiscal reconnu par tous vicieux ou insuffisant. Aujourd’hui les deux principales sources du revenu des villes sont l’impôt immobilier et l’impôt des patentes de commerce. Saint-Pétersbourg possède en outre beaucoup de petites taxes municipales, parfois plus vexatoires que productives. Le rendement annuel de dix ou onze de ces taxes secondaires (taxes sur les marchands ambulans, sur les cochers de fiacre, sur les artèles ou associations de portefaix, sur les courtiers maritimes, les notaires, les agens de change etc.), ne dépassait pas beaucoup la maigre somme de 200,000 roubles, et cependant le conseil municipal s’est prononcé pour le maintien de la plupart. Il y a encore des ressources affectées à des dépenses spéciales : ainsi une taxe pour l’éclairage des rues, une autre au profit des hospices de la ville. Il est à remarquer qu’à Saint-Pétersbourg même la rentrée de ces impôts ne s’opère pas toujours avec une parfaite régularité. L’impôt immobilier en particulier présente d’ordinaire des