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Page:Revue des Deux Mondes - 1878 - tome 28.djvu/946

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De ce qui précède, on peut conclure que Hume avait parfaitement raison. Ce qui est désirable d’abord, c’est que l’équilibre monétaire et par suite les prix se maintiennent avec le plus de fixité possible, et à cet effet il faut que les moyens d’échange s’accroissent dans la même proportion que la population et le mouvement des affaires. Si un changement doit intervenir, il vaut mieux que la quantité de numéraire augmente, car cette augmentation, pendant qu’elle se produit, a pour effet de stimuler l’industrie, de créer des entreprises nouvelles et par suite de fournir un emploi au surplus du numéraire. Si au contraire la monnaie se raréfie, les prix baissant, les industriels perdent ; ils diminuent leurs affaires, le travail fait défaut, le salaire baisse, la consommation diminue, tout est frappé de stagnation, et alors même ce qui reste de numéraire devient trop considérable et s’accumule dans les banques ; il se retire de la circulation, faute d’un emploi rémunérateur dans l’industrie. Le congrès américain a été si frappé des graves inconvéniens qui résultent d’une contraction de l’instrument des échanges qu’au mois de mai dernier, avant de se séparer, il a décidé qu’on ne réduira plus la quantité du papier-monnaie au-dessous de ce qu’elle était à la fin d’avril, c’est-à-dire 347,681,016 dollars (environ 1,740 millions de francs). Pour ramener le papier-monnaie au pair avec le métal, les États-Unis ont dû faire comme l’Angleterre de 1815 à 1821, c’est-à-dire diminuer la quantité des billets en circulation et amener ainsi une diminution des prix jusque là surélevés, puisqu’ils étaient comptés en papier déprécié. Cette baisse des prix a provoqué l’atonie des affaires dont souffre l’Union et dont nous ressentons le contre-coup parce que les Américains appauvris sont moins en état d’acheter nos produits.

S’il est démontré, — et je pense qu’aucun économiste ne le contestera, — qu’une diminution des instrumens d’échange a pour effet pendant qu’elle s’opère de diminuer les profits, de mettre tous les industriels en perte et par suite de réduire les salaires, les transactions, le commerce et tout le mouvement économique en général, on peut juger de la sagesse de la mesure qui consisterait à expulser l’argent de la circulation en diminuant d’un bon tiers l’instrument de la circulation. Les chiffres acceptés par tous le prouvent, les deux métaux précieux réunis répondent à peine aux besoins, et l’on voudrait obliger le monde à ne plus faire usage que d’un seul, l’or, alors précisément que sa production a diminué de plus d’un tiers. Tous les contrats dans l’univers entier sont basés sur l’emploi des deux métaux, car le monde, pris dans son ensemble,