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Page:Revue des Deux Mondes - 1878 - tome 29.djvu/595

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L’INVASION CHINOISE
ET
LE SOCIALISME AUX ETATS-UNIS

Dans le congrès tenu à Berlin, le comte Schouvalof, représentant de la Russie, a cru devoir en quelques mots discrets appeler l’attention de ses collègues sur un côté de la question asiatique dont l’Angleterre et les États-Unis se préoccupent ajuste titre. Faisant allusion à ces centaines de millions d’êtres humains qui habitent l’empire chinois et les Indes, il a signalé le danger qu’ils pourraient faire courir, non-seulement à l’empire anglais et à l’Amérique, mais au monde entier, le jour où, s’appropriant les armes d’une civilisation qu’ils haïssent, s’autorisant des traités qu’elle leur impose, ils les tourneraient contre elle et franchiraient des barrières désormais impuissantes à les contenir. En soulevant incidemment cette grave question, le comte Schouvalof n’était que l’écho autorisé des craintes qui, pour se manifester loin de nous et sous une autre forme, n’en sont pas moins réelles. Les journaux américains ont été les premiers à commenter, avec la vivacité que donne le sentiment du danger, l’avis opportun du représentant de la Russie. On ne saurait s’en étonner, car les liens de sympathie et de confiance qui existent entre les cabinets de Saint-Pétersbourg et de Washington ne sont un secret pour personne. La guerre de Crimée les a mis en plein jour, et tout récemment encore, quand on croyait un conflit imminent entre la Russie et l’Angleterre, c’est vers les États-Unis que l’empire russe tournait les yeux, assuré de trouver dans le concours des hardis croiseurs américains un appoint redoutable pour une lutte maritime.

Quelles que soient les influences auxquelles le comte Schouvalof a