et que le programme, un instant accepté par le conseil, fût exécuté sur l’heure avec une indomptable énergie, sans souci de considérations italiennes. Il aurait fallu aussi être assez clairvoyant pour adapter ses exigences aux circonstances nouvelles, et ne pas réclamer, en face de la puissance d’action révélée par la campagne de Bohême, des cessions territoriales qui répugnaient à la cour de Prusse avant la guerre, et que même au lendemain d’un désastre elle n’eût subies qu’à son corps défendant. Poursuivre l’annexion des provinces rhénanes sans avoir 300,000 hommes sous la main c’était s’exposer aux plus amers ressentimens, et, dans un avenir prochain, à un retour offensif immanquable.
Où était l’intérêt de la France et que lui conseillait une politique sage et vigilante, dégagée de toute influence étrangère et de toutes compétitions de pouvoirs ? Les vœux d’Auxerre s’étaient malheureusement réalisés : les traités de Vienne étaient déchirés. La conséquence qui en découlait nécessairement, c’était la rupture des liens fédéraux et l’Autriche expulsée de l’Allemagne. Ce résultat de la guerre nous affectait directement, mais après des victoires aussi rapides et aussi décisives, il était difficile de ne pas l’accepter comme un fait accompli. Ce qui importait, c’était d’en atténuer la portée, d’obtenir du cabinet de Berlin qu’il procédât avec une sage mesure à la réorganisation du corps germanique plutôt que de lui arracher avec effort, au risque de nous compromettre aux yeux de l’Europe, quelques lambeaux de territoire pour raccommoder nos frontières de l’est. La sécurité permanente du pays devait passer avant les satisfactions d’amour-propre ; il était dans l’intérêt de notre système défensif d’exiger, en retour de la dissolution de la confédération germanique et de la prépotence de la Prusse dans le nord de l’Allemagne, l’évacuation immédiate de la forteresse de Luxembourg, et de nous prémunir par les garanties les plus positives, sinon par un démantèlement, contre une occupation éventuelle de Mayence par les troupes prussiennes. Ce n’était plus une question d’ambition, mais de défense nationale ; c’était demander au cabinet de Berlin de nous donner des gages, c’est-à-dire de désarmer les positions offensives qui ouvraient notre territoire à sa puissance agrandie. Ces conditions formulées amicalement, bien qu’en portant la main à la garde de notre épée, auraient maintenu à notre politique son caractère de modération et de désintéressement.
Mais notre impuissance militaire étant constatée dans une mesure à peine croyable, mieux encore eût valu s’en remettre à un congrès européen pour débattre les conditions d’un nouvel état de choses. C’est l’opinion qu’émettait dans un de ses rapports notre premier secrétaire à Berlin, M. Lefebvre de Béhaine ; il croyait