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Voilà donc la cellule génératrice de l’être entier qui a elle-même pour principe générateur un être vivant ; voilà la loi de la génération première devenant la loi de toute l’évolution vitale. A la lumière de cette grande vérité, tout s’éclaire et s’explique dans le phénomène obscur de la formation et de la croissance de l’être vivant. Un seul exemple cité par M. Chauffard suffit à le montrer. Beaucoup de physiologistes, ayant à expliquer l’intussusception organique, ne savent y voir que l’introduction des sucs nourriciers, élaborés par les actes successifs de la digestion et de l’absorption, opération qui permet une assimilation temporaire de la matière introduite à travers les membranes vivantes. Ainsi comprise, l’intussusception ne diffère plus essentiellement de l’accroissement par juxtaposition. La vraie théorie de l’évolution vitale permet d’expliquer tout autrement la nutrition. L’intussusception devient une propriété vitale de la cellule qui la régit directement. C’est le noyau de la cellule qui gouverne toute la vie cellulaire, qui préside à la nutrition des élémens vitaux, qui provoque et réalise l’accroissement et la multiplication cellulaire. Soumise à cette activité centrale et rayonnante de la cellule, l’intussusception n’a d’une opération mécanique que l’action des forces physico-chimiques qui en sont les conditions ; dans sa cause déterminante, elle reste un acte spécifique et vital[1]. C’est ainsi que la physiologie cellulaire, loin de se prêter aux explications de la philosophie mécaniste, sert au contraire à confirmer les principes du vitalisme, en montrant comment la cellule primitive est vraiment créatrice et pourquoi elle transmet son type à toutes celles qui forment les tissus organiques. Car c’est là précisément la grande énigme pour toute philosophie qui ne cherche le principe de la vie que dans les élémens qui servent de matière aux êtres vivans. Comment comprendre que des produits d’élémens étrangers au principe vital puissent reproduire tous les caractères de ce principe ? Cela ne devient possible et facile qu’autant qu’on fait intervenir dans le travail de la génération cellulaire une cause qui y marque son action en y imprimant son type propre.


II

On sait comment, par d’ingénieuses explications, la physiologie mécaniste fait de l’homme une machine. Mais, quand on a démonté pièce par pièce l’organisme humain, quand on a résolu ou cru résoudre toutes les forces vitales en de pures transformations de

  1. Pathologie cellulaire, p. 117.