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Page:Revue des Deux Mondes - 1878 - tome 30.djvu/905

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Ato Mokanen seul en a les clés et vient y prendre les choses que désire le roi ; dans d’autres salles se trouvent les provisions, plus de 500,000 kilogrammes de miel, puis d’énormes tas de blé, d’orge, de tef et d’autres céréales, suffisant pour nourrir une grande armée pendant plus d’un an.

« Le 24 mai, nous étions au campement de Tciatou chez les Gallas ; l’armée réunie en cet endroit pouvait bien compter soixante mille combattans. Pour suivre plus longtemps le roi, je m’étais écarté de ma route de trois jours de marche à cheval. De bon matin Minylik me fit mander près de lui, ma tente était toujours dressée à côté de la sienne, et nous nous fîmes nos adieux. Il me confiait à Azadj Woldé Tsadek qui devait m’accompagner dans toutes mes excursions ; des ordres avaient été donnés pour que les objets, les hommes et les bêtes de somme dont je pourrais avoir besoin fussent mis sur-le-champ à ma disposition. Le voyage se fit sans incident ; à une demi-journée de Litché, je voulus voir Angolala, ancienne résidence de Sahlé Sallassi et où plusieurs voyageurs français avaient laissé des souvenirs. Cet endroit est aujourd’hui complètement abandonné.

« Après un séjour de vingt-quatre heures à Litché, nous nous mettons en route, mon compagnon et moi, pour une première tournée ; je désirais visiter les forêts de Fekrié Gumb et de Gourgouf, toutes deux considérables et dont les bois de première qualité devaient m’être fort utiles pour les constructions de la future colonie. Chemin faisant, je devais visiter aussi une mine de houille imparfaitement indiquée par M. Rochet d’Héricourt dans son second voyage au Choa. La houille est parfaitement connue des Éthiopiens qui l’appellent d’un nom caractéristique : denga kasal, charbon de pierre, et plusieurs échantillons m’en avaient été apportés par les gens du roi, quoique personne ne soupçonnât parmi eux l’usage qu’on en pouvait faire. Le gisement de Tianou m’intéressait surtout, par sa situation particulière dans les kouallas ou basses terres, près de la frontière des Adels, à proximité du fleuve Aouach et de la côte du golfe d’Aden ; je voulais me rendre compte par mes propres yeux des conditions matérielles de l’exploitation, de l’importance et de la richesse du gisement. À Tianou je pris des renseignemens et je trouvai des guides pour me conduire. Au sortir de la ville, nous suivîmes pendant plus de deux heures la direction du sud, et, entrant alors dans une contrée appelée Melka Kontero, nous atteignîmes la mine de houille de Kouéli ; c’est le nom de l’endroit. La couche apparente forme du nord au sud cinq forts mamelons qui semblent sortis de terre d’une seule poussée, longs environs d’une centaine de mètres et hauts de trois à cinq ; à la surface la houille est friable ; dans certains endroits elle est recouverte