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Page:Revue des Deux Mondes - 1879 - tome 31.djvu/580

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REVUE DES DEUX MONDES.

par ce riche amateur. L’an dernier, dans le camp des archéologues, on comptait un peu sur l’exposition rétrospective pour voir au moins les plus belles pièces de cette galerie si vantée par les rares privilégiés qui en ont franchi le seuil ; mais, à peu près seule de toutes les grandes collections françaises, la collection de M. de Clercq n’a brillé au Trocadéro que par son absence.


II

On avait remarqué les objets trouvés à Cypre qui, des mains de M. Péretié, avaient passé dans celles du duc de Luynes, et les musées de l’Europe commençaient à éprouver le désir de voir représentée dans leurs salles cette branche longtemps oubliée de l’art oriental. Peut-être laisserait-elle les artistes assez indifférens ; mais on le sentait, il y avait là beaucoup à apprendre pour les historiens. Aussi lorsqu’en 1860 M. Renan se vit chargé par l’empereur d’explorer la côte de l’antique Phénicie, il résolut tout d’abord de ne pas laisser Cypre en dehors de ses recherches ; une exploration attentive de l’île lui parut le complément nécessaire des études et des travaux entrepris sur le continent voisin. Au mois d’août 1861, il s’apprêtait à s’embarquer pour Larnaca ; il se proposait de parcourir l’île tout entière et d’y préparer une campagne de fouilles pour l’hiver suivant, lorsqu’une douloureuse épreuve vint le forcer à repartir pour la France, atteint tout à la fois dans sa santé et dans ses plus chères affections. De retour à Paris, il regrettait vivement de n’avoir pu visiter Cypre, quand il apprit que M. le comte Melchior de Vogüé allait retourner en Orient. M. de Vogüé, déjà connu par ses recherches sur les églises chrétiennes de la terre-sainte, était aussi très compétent en matière d’archéologie phénicienne. M. Renan lui demanda de comprendre l’île de Cypre dans son itinéraire, et M. de Vogüé, se prêtant à ce désir, se chargea d’organiser les fouilles qui devraient être faites pour le compte de la mission. En compagnie de M. Waddington et avec l’aide de M. Duthoit, architecte, il exécuta, dans les premiers mois de 1862, une exploration complète du sol de l’île ; il entreprit même sur plusieurs points des fouilles dont le Louvre a largement profité. Les résultats scientifiques de cette campagne devaient d’abord être compris dans le grand ouvrage de M. Renan, la Mission de Phénicie ; puis la partie relative à Cypre fut promise comme un ouvrage à part, que donneraient de concert M. Waddington et de Vogüé. Dans l’intervalle, M. de Vogüé devenait ambassadeur de France à Constantinople et à Vienne, M. Waddington ministre de l’instruction publique et plus tard des