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moyens se présentent : ou bien ignorer le danger et se bercer dans un imperturbable optimisme en répétant : Laissez faire, laissez passer ; le monde va tout seul. C’est ce que conseillent les économistes. Ou bien comprimer à outrance, supprimer les journaux, dissoudre les associations, tâcher d’extirper ainsi le mal par la force ; c’est ce que veut le gouvernement. Ou bien enfin désarmer le mouvement de ses haines subversives, en s’efforçant d’améliorer la condition des ouvriers. C’est le système mis en pratique à Mulhouse par M. Dollfus et ses amis. Il vient de l’exposer au parlement de l’empire, et il lui attribue l’absence du socialisme révolutionnaire en Alsace. C’est là le moyen que recommandait le Staats-Socialist. Il ne tarda pas à exposer le programme du parti qu’il s’agissait de fonder. Le voici : « Principes généraux : Le parti chrétien-social des ouvriers se fonde sur le terrain de la foi chrétienne et de l’attachement au roi et à la patrie. Il rejette la démocratie sociale comme impraticable, antichrétienne et antipatriotique. Il s’efforce de fonder une organisation pacifique des travailleurs afin de préparer des réformes pratiques de commun accord avec les autres élémens de la vie nationale. Il a pour but de diminuer la distance qui sépare le riche du pauvre, et d’établir ainsi la sécurité économique. Le programme réclame de l’état la création de corps de métiers distincts d’après le travail auquel ils s’adonnent, mais obligatoirement constitués dans tout l’empire et appuyés sur un règlement sévère pour l’admission des apprentis. Des commissions arbitrales seront constituées et leurs décisions auront force légale. Création obligatoire de caisses de secours pour les veuves, les orphelins et les invalides du travail. Les corps de métiers défendront les intérêts des ouvriers dans leurs rapports avec ceux qui les emploient. Interdiction de tout travail le dimanche. Suppression du travail des enfans et des femmes mariées dans les fabriques. Durée normale de la journée réglée d’après la nature du travail. Il faut que ces règlemens deviennent l’objet des conventions internationales. En attendant qu’ils le soient, il convient de protéger le travail national contre la concurrence des pays où des mesures semblables n’existent pas. Règlemens sévères contre l’insalubrité des locaux et des procédés des fabriques. Les propriétés de l’état et des communes seront exploitées dans l’intérêt des ouvriers, et on les augmentera autant que cela est économiquement et techniquement possible. Impôt progressif sur le revenu pour compenser les impôts indirects qui frappent principalement les classes laborieuses. Impôts très élevés sur le luxe. Impôt sur les successions, progressif suivant l’importance de l’héritage et l’éloignement du degré de parenté. » Le programme demande au clergé de prendre une part active et dévouée à tous les efforts