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effet, le poème de l’Intelligenza, attribué à Dino Gompagni, dit :


Ne bei meai d’aprile e di maio,
La gente fa di fior le ghirlandette,
Donzelle e cavalieri d’alto paraio
Canton d’amore novello e canzonette.


En Provence, le 1er mai, on choisit le majo, jolie petite fille qu’on habille de blanc, qu’on couronne de roses, qu’on pare de guirlandes et qu’on promène dans la ville[1] ; Ailleurs, au lieu d’un enfant, on se sert d’une branche fleurie ou d’un arbre, qui porte le nom de Mai. Comme il arrive quand deux systèmes sont en présence, les cultes hostiles se sont fait des emprunts. Au XVe siècle (1449), les orfèvres offrirent un « mai verdoyant » à Notre-Dame de Paris, à celle que l’église romaine nomme « fleur du Carmel » (flos Carmeli, virgo florigera), Ces fêtes fournissaient à la muse populaire une heureuse occasion. Laurent de Médicis, qui comprenait le charme de la poésie du peuple, a composé plusieurs maggi :


Si vuol appicare un maio
A qualcuna che tu ami, etc.


On chante toujours des maggi dans plusieurs parties de la Toscane, et comme au siècle du Magnifique, comme au temps des fêtes romaines de Flore, l’idée de l’amour s’associe à celle de l’apparition des fleurs et du retour du printemps : appicare il maio ad una porta équivaut à une déclaration[2]. M. Rubieri, qui publiait récemment, à Florence, une étude sur la poésie populaire de l’Italie[3], croit que les chants de mai font parfois allusion à des exploits de chasse, de pêche et même de guerre. Il est certain qu’à Syracuse la fête de mai se confond avec le souvenir de la victoire des Syracusains sur l’Athénien Nicias[4].

Les fêtes de ce genre ne se trouvent pas seulement chez les nations novo-latines. Chez les Germains, elles se rattachent à d’autres dates de la résurrection de l’astre du jour. À Noël, le soleil est comme un faible enfant dont le premier et charmant sourire éclaire la neige immaculée ; mais ce sourire suffit pour éveiller la nature endormie et « consoler l’univers » mieux que celui des filles d’Eve. Aussi les légendes germaniques rapportent que dans la nuit de Noël un chasseur sauvage apporte du blé et des fruits mûrs. On croit que, par miracle, les fraises parfumées se montrent sur la terre couverte

  1. De Nore, Coutumes, mythes et traditions des provinces de France.
  2. Tigri, Canti popolari toscani, introduction.
  3. Storia della poesia popolare italiana.
  4. Avolio, Canti popolari di Noto.