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an, mais on s’est procuré 3 ou 4 autres milliards pour accomplir le troisième réseau, et le cours des obligations n’a pas cessé de monter. C’est à ce point que, si on veut se reporter à quelques années en arrière et faire une comparaison entre le 3 pour 100 de l’état sans amortissement et les obligations de chemins de fer amortissables, en un temps pourtant assez long, soixante-quinze ans en moyenne, on trouvera que le crédit des obligations est celui qui a le plus gagné. Il y avait autrefois entre le revenu des obligations et celui de la rente 3 pour 100 un écart de 1/2 pour 100 au profit de la rente, c’est-à-dire qu’on préférait celle-ci à 1/2 pour 100 d’intérêt de moins. Aujourd’hui, comme les cours l’indiquent, c’est le contraire qui a lieu. On donne, à intérêt égal, la préférence aux obligations. Lorsque le comte Roy disait en 1824 que le capitaliste sérieux s’occupait peu de l’accroissement du capital remboursable, cela était peut-être vrai pour son époque, ce serait absolument faux maintenant, il s’en préoccupe au contraire beaucoup et pour l’obtenir il consent volontiers à une réduction d’intérêt.

L’obligation amortissable avec prime de remboursement est le fonds par excellence du père de famille. Non-seulement nos compagnies de chemins de fer ont émis de ces sortes de titres pour 7 ou 8 milliards, mais il en vient tous les jours de l’étranger pour des sommes considérables; c’est par milliards encore qu’il faut compter les obligations des chemins de fer russes, autrichiens, espagnols, italiens, etc., qui circulent dans notre pays. Enfin les grands états n’empruntent plus autrement. Et l’on viendrait dire que cette valeur n’est pas très connue en France! Il est vrai que le premier essai qui a été fait de notre 3 pour 100 amortissable n’a pas été très heureux; on l’avait émis, par je ne sais quelle combinaison, à un taux plus élevé que ne le comportait l’état du marché, à 86 ou 87 francs par exemple; il est retombé immédiatement au-dessous de 80 francs, et les spéculateurs qui en avaient pris ont perdu de l’argent. De là leur rancune contre ce fonds. La spéculation est assurément très respectable, et il serait fâcheux de l’avoir contre soi dans une grande opération financière comme la conversion, mais elle n’a pas l’habitude de bouder longtemps contre ses propres intérêts, ses rancunes sont passagères. Le jour où le 3 pour 100 amortissable deviendrait le principal fonds de l’état, il aurait un grand marché, et les spéculateurs s’empresseraient de l’adopter. Ils s’y rallieraient d’autant plus vite qu’ils auraient une marge plus forte pour leurs opérations.

Le 3 pour 100 ordinaire a toujours été le fonds préféré par les banquiers, précisément à cause de cette marge qu’il y a entre le prix d’achat et le taux du remboursement. Pourquoi n’accueilleraient-ils