Sans rapporter en détail toutes les opinions de Galien, nous ajouterons quelques mots qui expliqueront les théories qu’il professait sur l’état du sang dans le corps.
Les alimens vont par les veines dans le foie et de là au cœur : le cœur reçoit l’air du poumon, et ce mélange des alimens et de l’air se fait par les pores de la cloison qui sépare les deux ventricules. Ce n’est pas là une des moindres curiosités de l’œuvre de Galien que la croyance à cet orifice fantastique. La cloison qui sépare les deux ventricules n’est traversée par aucun pore ; elle n’a aucun trou, aucun orifice, et cependant, sur la foi de Galien, jusqu’à Servet on admet l’existence de ces pores. « Mondini dit que la cloison est percée. Vassœus ou Le Vasseur dit comme Mondini ; vingt autres disent comme ces deux-là ; Béranger de Carpi le premier avoue que les trous ne sont pas bien visibles chez l’homme. » (Flourens.)
Une autre erreur de Galien est de croire que la veine pulmonaire, à savoir le vaisseau qui ramène le sang du poumon au cœur, contient de l’air. L’aveuglement est manifeste ; car, de même que Galien a prouvé que les artères ne contiennent que du sang, de même il aurait pu prouver que la veine pulmonaire ne contient que du sang. Il ne le fait pas cependant, et, sur la foi d’Aristote, il suppose que l’air passe du poumon au cœur par la veine pulmonaire.
La troisième erreur de Galien n’est pas moins grave que les deux précédentes : il pense que les veines viennent toutes du foie, que le sang veineux chemine du foie dans les organes et que le foie est le grand réservoir du sang. Les anciens se faisaient une idée exagérée de l’importance du foie, et leur doctrine, religieusement conservée par les médecins, se transmettra jusqu’au moyen âge et au delà. Il faut arriver jusqu’au milieu du XVIIe siècle pour que le foie soit détrôné. On lui fera même des funérailles, et Bartholin l’enterrera en termes ironiquement pompeux (1652).
Ne nous arrêtons pas trop longtemps sur les erreurs de Galien. Il vaut mieux reconnaître la grandeur des découvertes qu’il a faites, car une erreur peut être réparée par les recherches des successeurs, tandis qu’un progrès acquis est un bienfait dont tous les successeurs profitent. Guidé par ce principe, que la nature ne fait rien en vain et que toute disposition de l’organisme est adaptée à une fonction, Galien a reconnu l’usage des valvules du cœur. Il a vu que le sang passe de l’oreillette dans le ventricule. Il a vu que le sang de la veine cave va au cœur pour être lancé par l’oreillette droite dans le ventricule droit, et par le ventricule droit dans les poumons. Il a vu que le ventricule gauche chasse le sang dans les artères et que les artères sont pleines de sang, contrairement à Érasistrate, enfin