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différentes : Presse parisienne (journaux du matin) ; Presse parisienne (journaux du soir) ; Presse départementale ; Presse étrangère. Cela se fabrique à la délégation de l’intérieur et de la sûreté générale ; cela est signé : Le chef de la division de la Presse : Alexandre Lambert. On en a publié environ cent vingt numéros, dont la collection, aujourd’hui très rare, est un document précieux pour l’histoire de la commune. Les extraits empruntés à la presse étrangère contiennent de dures vérités à l’adresse des gens de l’insurrection et n’étaient remis qu’aux membres de la commune, qui pouvaient voir ainsi le mépris, pour ne pas dire l’horreur, qu’ils inspiraient à l’Europe civilisée. J’ai sous les yeux les feuilles qui analysent les journaux du 20 mai, et qui par conséquent ont paru le jour où la France allait reprendre sa capitale. On y propose des mesures violentes. La Vérité a blâmé le décret qui supprime dix journaux d’un coup ; elle « persiste à confondre l’état normal et régulier d’une société avec l’état de guerre. En présence de cette mauvaise foi, de cet entêtement à vouloir dénaturer les faits et fausser les principes, il serait prudent d’appliquer à ce journal la loi du comité de salut public. » Ceci n’est qu’une dénonciation ; voici la calomnie : « L’Agence Reuter a signalé aux journaux anglais un article secret du traité de paix, aux termes duquel le gouvernement prussien s’est engagé à prêter le concours de ses armes au gouvernement de Versailles pour réduire Paris. » On fait remarquer, en outre, que les négocians parisiens réfugiés à la campagne n’ont point hésité à emporter hors de Paris leur « numéraire, qui fait ainsi défaut à notre cité ; » et l’on termine en disant : « Ne pourrait-on pas remédier à ce grave inconvénient ? » La moralité de ces gens-là était d’une trempe bien particulière ; sans sourciller et sur la même feuille de papier, ils font une délation, ils propagent un mensonge qui est calomnieux et proposent un acte de confiscation ; toujours pour ne « pas confondre l’état normal et régulier d’une société avec l’état de guerre. » Sans trop s’en douter peut-être, ils font des aveux bons à retenir et prouvent qu’ils ne reculent devant l’emploi d’aucun moyen de destruction. « Les artilleurs fédérés se plaignent de la mauvaise qualité des munitions. Les projectiles n’éclatent pas. Les bombes à pétrole sont remplies d’un liquide qui ne s’enflamme point. » On doit bien penser que dans cette feuille autographiée, rédigée sous la responsabilité de la délégation de l’intérieur et de la délégation de la sûreté générale, destinée à porter la lumière dans l’âme même du peuple, réservée à la glorification de la commune et à la confusion des ennemis d’icelle, on doit penser que les crimes des « curés » n’ont point été omis. Non certes, et on dit, sans réserves, leur fait aux