Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1879 - tome 35.djvu/104

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

monumens : sauf quelques exemplaires au musée grégorien et dans deux ou trois galeries étrangères, c’est à peu près tout ce qu’on en connaît.

M. de Rossi a fait graver cette maison de Romulus en tête de son nouvel ouvrage ; voici pourquoi. Il a entrepris de rechercher quelles ont été, suivant l’ordre des temps, les diverses formœ de la ville, c’est-à-dire les transformations topographiques constatées par les divers cadastres officiels, depuis Romulus jusqu’au temps de la renaissance. Il a essayé ensuite de retrouver les plans qui ont été dressés pour reproduire ces diverses phases et traduire ces calculs, ou tout au moins de restituer les cadres qui ont offert la matière des principaux arpentages selon les accroissemens ou les remaniemens successifs. Ce n’était pas un médiocre travail : il ne s’agissait de rien moins que de suivre concurremment sur le terrain et dans l’histoire le développement chronologique des divisions administratives et topographiques de Rome. Or la maison de Romulus figure naturellement à la première page d’une telle étude parce que, reproduisant le modèle des primitives habitations des Romains ou de leurs dieux, elle représente l’embryon, la première parcelle de propriété, l’unité géométrique, pour ainsi parler, dont les arpenteurs auront à tenir compte et à laquelle ils compareront les autres dimensions. Elle offre en même temps ce mérite d’accuser tout d’abord, par un symbolisme traditionnel, le caractère religieux qu’affecta toujours chez les anciens Romains la délimitation de la propriété. Tout le monde a lu dans Plutarque et Tite-Live quel acte solennel précédait la fondation d’une ville. L’augure, debout sur le Palatin, a tracé dans les airs, avec son bâton recourbé, le double cardo et le double decumanus, perpendiculaires l’un à l’autre. Il a fait descendre ce carré des cieux sur la terre par la vertu des formules saintes, et dès lors le fossé nouvellement creusé, les murs nouvellement construits, l’enceinte même, ont participé d’un spécial caractère. Les divisions intérieures de la cité, depuis la petite maison primitive, entourée de son champ de deux arpens, hortus, heredium, jusqu’aux voies publiques, aux murs et aux propriétés sacrées, ont été de même ordonnées avec le secours de la religion, qui a garanti par ses fermes attaches à la fois le droit des particuliers, celui de l’état, et la régularité du cens, d’où la bonne administration politique et civile dépendait. Nul doute que Rome n’ait eu très tôt un véritable cadastre, ne fût-ce que pour fixer l’état des personnes et l’assiette de l’impôt. Nul doute qu’il n’y ait eu dès les premiers siècles une archive dans quelque temple, ainsi que des plans officiels et publics attestant le droit des particuliers et celui de l’état. Rome avait été précédée ou bien elle