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pousser la reine plus avant dans la voie où l’on pensait que sa dévotion devait l’engager. Claude de Rebé se plaisait à représenter l’église gallicane comme étant déjà assurée par le seul avénement de la reine mère au pouvoir de retrouver toute son autorité. « C’est, disait-il à Anne d’Autriche, de votre majesté que nous avons tous les sujets du monde d’attendre cet accomplissement et ce comble de bonheur et de félicité, et déjà nous prévoyons que l’église, cette épouse du fils de Dieu, ne doit jamais appréhender de devenir souffrante sous votre royale conduite. » Le prélat termina sa harangue en rappelant ce qu’avait fait le feu roi pour l’église et donnant à entendre qu’on espérait maintenant davantage. « Nous espérons, votre même nous tirons de là, s’écriait-il, un secret pronostic des beaux jours pleins de joie, de paix et de jouissance, dont nous jouirons, Dieu aidant, pendant le règne du fils, sous la douce régence de la mère. » Ces paroles ne prophétisaient que trop la révocation de l’édit de Nantes. Mais l’heure n’était pas encore venue pour le clergé de remporter cette funeste victoire, et Anne d’Autriche, toute dévote qu’elle fût, se montra plus sage que ne devait l’être son fils. Elle se borna à répondre par des assurances peu compromettantes sur ses bonnes dispositions à l’égard du corps ecclésiastique. Elle ne prit aucun engagement positif et renvoya, selon l’usage, le contenu des remontrances à l’examen du chancelier. C’était en effet à celui-ci qu’il appartenait de peser la valeur des plaintes, et ce magistrat était un politique trop avisé pour laisser le gouvernement se mettre encore sur les bras les protestans, quand il avait déjà à pourvoir à tant de difficultés, surtout du côté de ses finances. En dépit de la promesse formelle de Louis XIII de ne rien demander au clergé en sus du subside des quatre millions, quand même la guerre durerait plus de trois années, la régente avait résolu de lui faire un nouvel appel de fonds ; mais comme un tel appel risquait fort d’être mal accueiUi, l’on jugea nécessaire d’user d’abord de beaucoup de ménagemens. Les commissaires royaux se bornèrent à représenter à l’assemblée les grandes dépenses auxquelles la guerre obligeait l’état et le devoir qui incombait à l’ordre ecclésiastique de venir à son aide. Le ton de ces représentations était assez timide, et ils les accompagnèrent de force démonstrations de respect pour l’auguste compagnie : précautions d’autant plus opportunes qu’outre le renouvellement du contrat avec l’Hôtel de Ville il s’agissait d’obtenir le vote d’une subvention extraordinaire d’un chiffre élevé. Tout occupée de réviser ce qui avait été fait à Mantes, l’assemblée ne se pressa pas de répondre à cette mise en demeure ; elle entendait, avant de rien donner, que le gouvernement revînt sur plusieurs des mesures auxquelles l’assemblée tenue dans cette ville avait été contrainte d’ad