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prisonnier, grâce aux affidés, aux amis dévoués qui le servaient, il le fit transférer au château de Nantes. Les vicaires-généraux nommés par l’incommode prélat n’en persistèrent pas moins à administrer en son nom le diocèse. La cour avait, il est vrai, répandu le bruit qu’il avait consenti à donner sa démission ; mais le clergé mandait à Rome que cette démission avait éié obtenue par la violence, et le pape se refusait à l’accepter. L’administration provisoire des grands-vicaires de Retz porta le trouble parmi les fidèles. Le clergé était généralement mécontent de la résistance qu’opposait à la prise de possession Mazarin, qui restait sous le coup de sa vieille impopularité. Le gouvernement essaya de l’intimidation. Plusieurs des ecclésiastiques qui s’étaient le plus ouvertement prononcés contre la détention de leur archevêque et en faveur de ses droits furent l’objet de poursuites. L’évasion du cardinal du château de Nantes, arrivée le 8 août 1654, évasion dont il nous a laissé la curieuse relation dans ses Mémoires ne fit qu’augmenter les difficultés de la situation et enveniner le dissentiment entre le clergé de Paris et le gouvernement royal. Retz informa par une lettre le chapitre de Notre-Dame et les curés de la capitale de sa retraite au château de Brissac, près Beaupreau. Grande fut la joie parmi ses amis, qui firent chanter un Te Deum à Notre-Dame. Les ministres conseillèrent au roi, qui se tiouvait alors à Péronne, de prendre contre le cardinal, dont la fuite menaçait de rallumer la guerre civile, des mesures énergiques et ordre fut promulgué à tous les sujets du royaume d’arrêter et de livrer le fugitif, qu’on se proposait de conduire au châeau de Brest. Cette mesure indigna le clergé, auquel le pape venait de faire savoir qu’il désapprouvait la façon dont on s’y était prit pour arracher au prisonnier sa démission. Le gouvernement redoubla de surveillance et de rigueur à l’égard des partisans avoué ; de Retz et prétendit trancher la difficulté par un acte d’autorité. Un arrêt du conseil d’en-haut déclara le siège de Paris vacant, et il fut enjoint par huissiers aux doyens, chanoines et chapitre de cette ville de s’assembler pour commettre des grands-vicaires à l’adminstration du diocèse pendant cette vacance. Au lieu de calmer l’agitation, ce coup d’état la porta à son comble. La majorité du clergé parisien dénia au roi le droit de déposer l’archevêque auquel un procès en règle n’avait point été fait ; elle persista à tenir pour dûment investis de l’administration diocésaine les grands-vicaires que Rîtz avait nommés. La résistance se manifesta de tous côtés, et le fugitif, qui s’était rendu à Rome, l’excitait par ses émissaires. Il avait écrit en France pour protester contre le traitement à lui infligé, il soutenait qu’on lui avait extorqué sa démission. Il représentait, le gouvernement du roi comme