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les observatoires de Naples, de Turin, de Modène, et celui du Capitole. Tous ces établissemens, animés d’une noble rivalité, ont déployé un grand zèle et contribué pour leur part aux progrès de l’astronomie, jusqu’au jour où, découragés par des exigences nouvelles hors de proportion avec leurs moyens, ils ont baissé pavillon. Cet arrêt de développement remonte au premier tiers de notre siècle. « À cette époque, dit M. Rayet, les observatoires des grands états, disposant de ressources considérables, commencèrent à faire construire des instrumens beaucoup plus grands, plus précis et malheureusement aussi plus coûteux. A leur tour, ces instrumens plus parfaits exigeaient une installation beaucoup meilleure ; il leur fallait un point d’appui stable, des salles et des coupoles construites exprès pour eux. Les ressources limitées des petits états entre lesquels l’Italie était alors divisée, et des universités qui végétaient péniblement dans les villes, se trouvèrent tout à fait insuffisantes pour la substitution de ces puissans appareils aux lunettes anciennes maintenant hors d’usage et pour la rénovation de locaux devenus tout à fait défectueux. Les savans placés à la tête des divers observatoires italiens, se sentant impuissans à soutenir, avec les instrumens qu’ils avaient entre les mains et les maigres ressources dont ils disposaient, la lutte contre leurs confrères plus heureux de Greenwich, de Paris, de Poulkova, de Berlin et de Washington, s’abandonnèrent pour la plupart au découragement, finiront quelquefois par renoncer à des travaux fatalement condamnés à rester stériles, et laissèrent dépérir les établissemens dont ils avaient la garde. De là une sorte de torpeur à laquelle l’unification de l’Italie, en faisant espérer aux astronomes des jours meilleurs, est venue heureusement mettre fin. »

Les noms des astronomes que nous avons cités disent assez tout ce que l’astronomie doit à l’Italie, et ce qu’elle peut en attendre encore, quand la patrie de Galilée aura complètement repris son rang parmi les nations les plus avancées en culture intellectuelle. Pour en faire mieux juger, nous allons rappeler les faits les plus importans de l’histoire de ses divers établissemens astronomiques.

L’observatoire de Milan doit sa naissance au zèle de deux jeunes « lecteurs en philosophie » du collège de Brera, les RR. PP. Bovio et Gerra, qui dès 1760 établirent dans la partie la plus élevée du collège une lunette achromatique de 40 pieds de longueur focale, à l’aide de laquelle ils eurent, paraît-il, le bonheur d’annoncer les premiers l’apparition d’une comète. Ils se firent ensuite fabriquer par un serrurier de Milan un grand sextant de 6 pieds de rayon ; mais cet instrument, qui fit honneur à la bonne volonté de l’ouvrier, ne put guère être employé, C’est vers 1763 que fut décidée, d’après les conseils du B. P. Boscovich, la construction d’un observatoire plus sérieux, dont le savant jésuite garda la direction jusqu’en 1772. L’observatoire se composait