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porté à 323. Il est d’ailleurs difficile d’établir la ligne de démarcation entre les volcans actifs et les volcans éteints, car la plupart des volcans offrent des périodes de repos qui peuvent être de plus d’un siècle. On sait que le Vésuve était considéré par les anciens comme une montagne parfaitement inoffensive jusqu’à la grande éruption de l’an 79, qui ensevelit Herculanum et Pompéi, et qu’il est resté comme endormi pendant trois siècles (1306-1631).

Lorsqu’on jette les yeux sur une carte où les volcans sont marqués par des points rouges, ce qui frappe tout d’abord, c’est qu’ils sont presque tous situés à proximité des grands amas d’eau. Le plus grand nombre se trouve dans des îles, et, à peu d’exceptions près, les autres sont alignés sur les rivages de la mer ou des bassins lacustres. Autour du Pacifique, une série de montagnes ignivomes dessine un vaste cercle de feu qui comprend les côtes occidentales de l’Amérique, les îles Aléoutiennes, le Kamtchatka, les Kouriles, les îles du Japon, les Philippines, les Moluques jusqu’aux îles de la Sonde et à la Nouvelle-Zélande. En dehors de cette immense ceinture, on ne rencontre plus que des groupes isolés, mais toujours disposés près des bords de la mer ou voisins de quelque autre grande nappe d’eau. Comment ne pas conclure de cette distribution géographique qu’il existe une liaison intime entre les phénomènes volcaniques et le voisinage de l’eau? Ne dirait-on pas que l’infiltration des eaux est une condition nécessaire des éruptions, et que la force qui soulève les torrens de lave doit être la tension de la vapeur?

Cette opinion est confirmée par tout ce que nous ont appris de récentes découvertes sur la composition chimique des gaz vomis par les volcans. D’après M. Charles Sainte-Claire Deville, la fumée des volcans consiste principalement en vapeur d’eau. M. Fouqué a estimé à plus de 2 millions de mètres cubes la quantité d’eau qui est sortie de l’Etna sous forme gazeuse pendant l’éruption de 1865. Les nuages de vapeurs sortis d’un cratère d’éruption se condensent souvent et retombent en pluies diluviennes qui, en délayant les cendres volcaniques, produisent des torrens de boue. Les coulées de lave sont d’ailleurs elles-mêmes imprégnées de vapeurs qui donnent à ces masses incomplètement fondues une remarquable fluidité, et qui se dégagent rapidement pendant la descente de la coulée. Parfois même ces vapeurs emprisonnées occasionnent, en s’échappant brusquement, des éruptions en miniature au milieu d’un torrent de lave qui commence à se figer. Le sel marin et les autres élémens de l’eau de mer se retrouvent également dans les produits gazeux des éruptions comme dans les dépôts des fumerolles, et les recherches de M. Fouqué sur la composition