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à l’enveloppe solide un mouvement de rotation extrêmement lent qui se combine avec celui qu’elle possède déjà; la question est de savoir si le liquide intérieur participera à ce mouvement additionnel, ou si la croûte seule en sera affectée. « Pour moi, dit M. Delaunay, il n’y a pas lieu au moindre doute. Le mouvement additionnel dû aux causes indiquées est d’une telle lenteur que la masse fluide qui constitue l’intérieur du globe doit suivre la croûte qui l’enveloppe absolument comme si le tout formait une seule masse solide. Les pressions auxquelles sont soumises les diverses parties de la masse liquide sont si énormes que nous ne pouvons pas nous faire une idée de l’influence que ces pressions peuvent avoir sur le degré de viscosité du fluide dont il s’agit. Mais ce fluide fût-il dans des conditions identiques à celles des liquides que nous voyons autour de nous, cela suffirait pour que les choses eussent lieu comme nous venons de le dire. » M. Delaunay conclut en affirmant qu’à son avis les phénomènes de la précession et de la nutation ne peuvent fournir aucune donnée sur le plus ou moins d’épaisseur de la croûte solide du globe.

Sir William Thomson considère encore la question sous un autre point de vue. Lorsqu’on cherche à déterminer par la théorie la hauteur des marées, on suppose généralement que les eaux seules cèdent à l’attraction luni-solaire, tandis que l’enveloppe solide de la terre n’éprouve aucune déformation sous l’influence des forces qui soulèvent l’Océan. Or il est évident qu’une sphère même entièrement solide se déformerait toujours un peu par l’effet de ces forces, et que la déformation sera plus sensible encore pour une masse en partie liquide. Supposons d’abord que la masse entière du globe puisse céder aux forces qui la sollicitent, aussi facilement que si elle était liquide ; dans ce cas, les eaux et l’écorce solide se soulèveront tout d’une pièce, la surface de la mer restera donc toujours à la même distance du fond : il n’y aura pas de marée visible. En admettant que la masse du globe offre une rigidité moyenne comparable à celle du verre, on trouve qu’elle devra encore subir une déformation égale aux 0,6 de celle qu’elle subirait si elle était liquide, et, ce soulèvement étant retranché de celui de la nappe océanique, la hauteur de la marée n’est plus que les 0,4 de ce qu’elle serait sur une enveloppe invariable. En attribuant à la masse terrestre la rigidité de l’acier, sir W. Thomson trouve qu’elle éprouverait encore une déformation égale au tiers de celle d’une sphère liquide, et les marées apparentes se trouvent par là réduites aux 1/3 de ce qu’elles seraient sur une terre d’une rigidité absolue. Même en tenant compte de l’incertitude dont reste encore affectée la détermination théorique de la hauteur des marées, sir W. Thomson ne croit pas qu’on puisse admettre que la hauteur