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pour le plaisir de mentir. Chez les races inférieures, rebut de l’humanité, et qui par leur infériorité se rapprochent des enfans et des hystériques, on retrouve cette même tendance à la tromperie. La loyauté et la sincérité ne sont pas nées avec nous. Ce ne sont pas des dons naturels : ce sont des conquêtes sur la nature brute, et si l’homme fait est loyal et sincère, c’est qu’il a su corriger ses instincts mauvais.

On voit combien l’hystérie diffère de la folie. Dans la folie, l’intelligence est profondément atteinte, tandis que l’hystérie est plutôt une forme de caractère qu’une maladie de l’intelligence. De là l’intérêt psychologique de cet état. L’intelligence est brillante, la mémoire sûre, l’imagination vive. Il n’y a qu’un seul côté défectueux dans l’esprit, c’est l’impuissance de la volonté à refréner la passion. La volonté semble être en effet le rouage le plus délicat de l’organisme mental, et dès qu’une substance toxique vient troubler les fonctions intellectuelles, elle débute toujours en supprimant l’influence de la volonté sur les mouvemens de la passion.

L’hystérie, au moins dans sa forme légère, est extrêmement fréquente. Les causes qui la déterminent doivent donc être très communes. L’une des principales est l’hérédité. Si le père ou la mère a un tempérament nerveux, il est vraisemblable que la fille sera prédisposée à l’hystérie. Entendons-nous bien cependant sur le sens du mot hérédité. Il n’est pas nécessaire que la même forme de maladie se retrouve chez les parens et chez les enfans. Pourvu qu’il y ait chez les parens du nervosisme, ce nervosisme, chez les enfans, se reproduira sous divers aspects. Par exemple un père épileptique peut avoir un fils idiot, un fils fou et une fille hystérique. Cette loi de la fatalité héréditaire est également vraie, lorsqu’au lieu d’une maladie nerveuse aussi grave que l’épilepsie ou la folie, il s’agit simplement d’un tempérament nerveux. De même que la couleur des cheveux, la configuration du nez et le timbre de la voix se ressemblent chez les parens et les enfans, de même la forme du caractère se transmet d’une génération à l’autre. L’observation médicale de plusieurs siècles se rencontre avec le bon sens vulgaire. Au temps de la sorcellerie, la fille d’une sorcière, c’est-à-dire la fille d’une hystérique, était fatalement considérée comme sorcière, et il n’était pas besoin de chercher d’autres motifs d’accusation.

D’ailleurs, les causes accessoires viendront aider cette influence prépondérante de l’hérédité. Une jeune fille élevée avec une certaine recherche, et qui voit autour d’elle ses compagnes d’autrefois parvenues à une situation meilleure que la sienne, deviendra hystérique parce que le sort ne lui a pas donné les satisfactions qu’elle avait rêvées. Les songes déçus, les illusions évanouies, les espérances chimériques sont des motifs presque suffisans pour faire