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gouvernement que de minorité également homogène d’opposition. Il est probable que la majorité qui soutient en ce moment le cabinet actuel va devenir plus ou moins homogène par la fusion, ou du moins l’union de plus en plus étroite de la gauche pure et de l’union républicaine, avec l’exclusion du centre gauche, dans la chambre des députés. Ce pourra être une majorité de gouvernement, mais non libérale ni conservatrice. C’est en face de cette majorité que le groupe républicain libéral va constituer un parti d’opposition qui se rallie à son programme. Parler d’une conjonction des centres serait de l’histoire ancienne, après le grand duel où, à la façon des héros d’Homère, on n’a, de part et d’autre, mesuré ni ses paroles ni ses coups. Les groupes de la droite ne veulent ni ne peuvent accepter une alliance avec des adversaires qui ne veulent ni ne peuvent la proposer, à quelque fraction du parti républicain qu’ils appartiennent. Tout ce qui est possible, c’est une simple rencontre entre gens qui pensent de même, à cette heure, sur certaines questions. Quant aux groupes de gauche, c’est autre chose, le moment viendra, et il n’est peut-être pas éloigné, où les dénominations de centre gauche, de gauche pure, d’union républicaine, d’extrême gauche, ne répondront plus à la situation politique renouvelée par les événemens. Tous les groupes de gauche se fondront en deux grands partis, le parti de la république jacobine et radicale, qui est maîtresse à cette heure du gouvernement, et le parti de la république libérale et conservatrice, qui passe à l’opposition. Le premier est puissant par le nombre et par l’influence que donne le pouvoir. Le présent lui appartient. Le second, faible encore par le nombre, est surtout fort par les principes qu’il défend et par les sympathies qu’il ne peut manquer d’éveiller dans le pays, à mesure que les faits lui donnent raison. Il n’espère qu’en l’avenir. Il sait que son heure n’est pas près de venir, et que pour le moment il n’a guère d’autre rôle que de protester contre une mauvaise politique. Tout au plus pourra-t-il en arrêter les excès, avec le concours du sénat. Il pense que deux années d’opposition, telle qu’il entend la faire, suffisent à peine à sa tâche. C’est dans les élections générales qu’il espère trouver sa majorité de gouvernement.

Républicain, libéral, conservateur : voilà son symbole résumé en trois mots qui ne laissent aucune prise à la politique de l’équivoque et de la confusion. Le premier mot n’a besoin ni d’explication ni de définition. Il a une signification absolue. On n’est pas plus ou moins républicain : on l’est ou on ne l’est pas. C’est une question de principe, non de tempérament. Le deuxième mot n’a pas une signification moins absolue. La liberté étant aussi un principe, le premier de tous, on n’est pas plus ou moins libéral, à parler rigoureusement; on l’est ou on ne l’est pas. Si, par exemple,