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Page:Revue des Deux Mondes - 1880 - tome 39.djvu/645

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comme la France une taxe aussi déraisonnable que l’impôt sur les portes et fenêtres. Il serait si aisé de l’ajouter à la partie de l’impôt foncier qui frappe les bâtimens et de n’avoir qu’une taxe unique sur les constructions d’après la valeur locative ou d’après la valeur vénale[1]. »

Ces raisons ne peuvent pas nous convaincre et nous déterminer à donner notre approbation à cette réforme. Si on ajoutait les 40 millions que produit la contribution des portes et fenêtres aux 50 millions qui proviennent de l’impôt foncier sur les propriétés bâties, le contingent de cette catégorie de propriétés serait élevé de 80 pour 100; car, nous le répétons, la contribution des portes et fenêtres est supportée actuellement par les locataires. Une augmentation, d’un seul coup, de 80 pour 100, d’une partie de la contribution foncière est une mesure grave.

Cette réforme aurait l’inconvénient de transformer un impôt général sur l’ensemble des revenus en une contribution exclusivement foncière. Ce serait une innovation malheureuse, contraire aux tendances actuelles, d’ailleurs très sages, qui veulent favoriser, autant que possible, les taxes établies sur les bases les plus larges, sur l’ensemble des facultés des contribuables, de préférence à celles qui n’ont qu’une base restreinte. Il est évident qu’un impôt assis sur tous les revenus des contribuables est à la fois plus rationnel et plus facile à supporter que celui qui ne porte que sur une seule nature de revenus.

On pourrait, il est vrai, réunir l’impôt des portes et fenêtres à la contribution mobilière. Cette mesure serait évidemment préférable à celle que nous venons d’examiner; elle n’augmenterait pas les charges existantes des contribuables, car les deux impôts sont actuellement supportés par les mêmes personnes. La contribution porterait toujours sur tous les revenus; la manière de les atteindre seule serait différente. On croit que le loyer est un signe plus sûr de l’aisance des imposés que le nombre des fenêtres des appartemens qu’ils occupent; nous l’admettons également. Cependant nous estimons qu’il y a avantage à laisser subsister les deux impôts sous leur forme actuelle, et voici pourquoi: il est sage de diviser les impôts; ils paraissent moins lourds; si nous avons le malheur de ne pouvoir pas diminuer la réalité des charges, il est du moins d’une bonne politique d’en faire sentir le poids le moins possible; ajoutons que la réunion de l’impôt des portes et fenêtres à l’impôt mobilier enlèverait aux transactions une facilité qui favorise les affaires. Sous l’empire de la loi actuelle, dans certains cas, et à titre de concession, le propriétaire prend à sa charge l’impôt

  1. Traité de la science des finances, t. I, p. 344.