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chiffres sont faits pour donner une idée de l’importance toujours croissante du commerce des pierres précieuses et aussi de la richesse des gisemens. De temps à autre d’ailleurs, quand les mines en possession d’alimenter le marché commencent à ne plus suffire aux demandes de plus en plus pressantes de la joaillerie, malgré le secours efficace que lui a toujours prêté l’imitation, la découverte de nouveaux gisemens vient rétablir l’équilibre et remettre à flot le commerce languissant. On commence par accueillir avec défiance et par déprécier les nouveaux venus ; mais la résistance du préjugé n’est pas longue, et tout le monde profite des conditions nouvelles créées par la concurrence des fournisseurs. Quand la découverte des mines du Brésil, en 1725, menaça de déposséder l’Inde d’un antique privilège, — la quantité de diamans jetés dans le commerce par le Brésil atteignit 144,000 carats dans les vingt premières années, — on en contesta tout d’abord l’existence : les vingt premières années, — on en contesta tout d’abord l’existence : David Jeffries, dans son Treatise on Diamonds, se donne beaucoup de peine pour démontrer que les prétendus diamans du Brésil viennent en réalité de l’Inde. C’était plutôt le contraire qui était vrai : des marchands portugais, profitant de la sottise du public, achetaient à bon marché les diamans brésiliens et les faisaient passer dans l’Inde, où les anciens prix se maintenaient. Depuis cette découverte mémorable, il s’est passé près d’un siècle et demi sans qu’on ait signalé de nouveaux gisemens de quelque importance, car les trouvailles isolées faites dans les lavages aurifères de l’Oural n’ont donné lieu à aucune exploitation suivie, Mais, en 1867, la découverte des mines du cap de Bonne-Espérance est venue de nouveau changer les conditions du marché. Les premières pierres qui furent apportées en Europe étaient jaunes et assez impures ; on s’empressa de déclarer que les diamans du Cap étaient sans valeur. Tout diamant jaune de mauvaise qualité, venant du Brésil ou des Indes, était immédiatement réputé « diamant du Cap. » La commerce est déjà revenu de cette erreur. « Nous pouvons affirmer, disent les auteurs du nouveau Manuel, que parmi les diamans du sud de l’Afrique il y en a de qualité inférieure sans doute, mais qu’il y en a aussi dans les mêmes proportions d’excellente qualité, »

Les lecteurs de la Revue se rappellent sans doute les renseignement curieux qu’a donnés ici même sur les mines de diamans du Cap un voyageur qui les avait vues de près[1]. Il nous suffira d’ajouter quelques détails plus récens. L’exploitation de ces mines, qui se faisait d’abord par des moyens primitifs et dans un désordre fiévreux, s’est peu à peu régularisée en se centralisant entre les mains de sociétés formées à cet effet. Les sociétés diverses commencent aujourd’hui à se fusionner, et avant peu la compagnie française des diamans du Cap, qui s’est constituée sous la direction de M. Jules Porges, aura le monopole de cette immense

  1. Voyez, dans la Revue du 1er juin 1874, l’étude de M. Desdemaines-Hugon sur les Mines de diamant du Cap.