remonte à 1876 ; mais en résulte-t-il la nécessité de relever les tarifs ? Les crises qui se produisent accidentellement ne doivent point servir de règle pour la rédaction d’une loi. À ce compte, il serait équitable de mettre dans la balance les résultats des années prospères et de dire aux métallurgistes, aux propriétaires des mines de houille, aux filateurs, etc., que, s’ils veulent faire couvrir par le tarif les pertes de 1876 à 1879, ils doivent verser au trésor la portion des profits de 1872 à 1875, qui représente le montant des droits par lesquels ils n’avaient pas alors besoin d’être protégés. Pareille procédure serait adoptée pour l’avenir. Le trésor ouvrirait à chaque industrie, à chaque industriel, un compte-courant de protection. Nous convenons que l’hypothèse est absurde autant qu’impraticable ; mais c’est là qu’aboutit forcément la prétention de certains protectionnistes ; car, encore une fois, au temps où nous sommes, la législation ne supporterait pas qu’un groupe de citoyens, qu’un citoyen quelconque s’enrichît par l’effet du tarif, c’est-à-dire au moyen d’un impôt dont le produit ne serait pas exclusivement perçu au profit de l’état.
Un dernier argument, que l’on croit décisif, est invoqué. Il s’agit de l’intérêt des ouvriers. En réclamant des augmentations de tarifs, les industriels annoncent qu’il leur sera plus facile de maintenir le taux des salaires, en temps de crise, et de l’élever pendant les périodes de prospérité. L’argument n’est pas nouveau. Est-il juste ? Quand on observe que, dans l’Angleterre libre-échangiste et en France, depuis 1860, la rémunération de la main-d’œuvre est toujours en progrès, il est permis d’affirmer que le régime de la liberté est favorable aux intérêts de la main-d’œuvre et de ne point trop se confier aux promesses du régime contraire. Quoi qu’il en soit, il importe que les industriels se rendent bien compte de la situation qui leur serait faite, et devant la loi et surtout devant les ouvriers, si l’argument du salaire était accepté.
La chambre des députés a récemment adopté une proposition de loi relative à la protection de la marine marchande. D’après ce projet, qui n’a pas encore été examiné par le sénat, les armateurs recevraient une prime en argent, calculée d’après le tonnage des navires et d’après le nombre de milles parcourus ; mais la chambre a voulu que cette prime profitât au personnel du navire en même temps qu’à l’armateur, et, pour plus de sûreté, elle a introduit dans la loi un paragraphe ainsi conçu : « Il sera prélevé sur la prime une somme de 20 pour 100 qui sera distribuée à l’équipage proportionnellement aux appointemens, de façon à majorer les appointements actuels, « Cette disposition, introduite pour la première fois dans une loi de cette nature, n’aura probablement pas, si elle est maintenue, l’effet que l’on suppose. Aucune loi ne pouvant rendre fixes les gages