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concours d’où sortent les jeunes maîtres, chaque impulsion donnée soit par la rédaction des programmes, soit par la manière de juger les épreuves, est comparable à celle d’un gouvernail dont l’action se continue plus ou moins directe et durable.


I

L’agrégation, à laquelle nous devons, dans l’état actuel, à peu près tous nos professeurs de médecine, de sciences mathématiques et physiques, de droit et de lettres, est le principal ressort et la meilleure sauvegarde de l’université. M. Jules Simon, qui a écrit sur la Réforme de l’enseignement secondaire un livre de philosophe et de moraliste en même temps que d’homme d’état, en a très bien expliqué par quelques mots l’origine. C’est en vertu d’une ordonnance royale du 3 mai 1766, quatre ans après l’expulsion des jésuites, et afin de pourvoir aux lacunes résultant du départ subit de tant de maîtres, que fut établi un concours annuel, jugé par l’université elle-même, en faveur de ceux qui, déjà munis des grades traditionnels, souhaitaient en outre d’être « agrégés au corps des professeurs, » et d’obtenir de la sorte une situation régulière dans l’enseignement. Soixante places de docteurs agrégés étaient créées dans l’ancienne Université de Paris, pour la philosophie, les humanités et la grammaire. Jacques Delille, le traducteur des Géorgiques, fut reçu au premier concours, qui eut lieu en octobre 1766. — C’était une profonde innovation, puisqu’à la licence conférée par le chancelier de Notre-Dame on substituait une épreuve tout intérieure et indépendante. Le décret du 17 mars 1808, en organisant l’université impériale, étendit l’institution à toute la France ; le titre ne fut toutefois donné d’abord que par collation, chaque lycée devant avoir trois agrégés seulement, pour les sciences, les lettres et la grammaire.

Les premiers concours d’une agrégation commune ne furent établis qu’en 1821, mais uniquement encore pour les trois mêmes facultés. Ce n’était pas qu’on négligeât entièrement le projet de créer un enseignement historique. On peut suivre dans le recueil des Circulaires et Instructions officielles relatives à l’instruction publique les timides velléités qui se traduisirent bientôt en un commencement imparfait d’exécution. Le point de départ est marqué par une circulaire du 26 avril 1817, où M. Royer-Collard, président de la commission de l’instruction publique, se plaint de ce que « les notions d’histoire et de géographie, qui servent de commentaires aux textes anciens et qui doivent entrer nécessairement dans le plan d’une éducation classique, » font toujours défaut. « Cette partie de l’enseignement, ajoute-t-il, n’a donné que des