Page:Revue des Deux Mondes - 1880 - tome 42.djvu/844

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

gouvernement napolitain, sous les ordres de l’amiral Cosa. Enfin Venise put armer deux corvettes et un brick. Cette réunion de bâtimens comprenait quatre frégates, une corvette et deux bricks du Piémont ; deux frégates et un brick de Naples ; les deux corvettes et le brick vénitiens : en tout une force double de l’escadre autrichienne. Mais celle-ci était d’autant moins prête à la bataille qu’elle comptait dans ses équipages un certain nombre d’Italiens peu disposés à la lutte contre leurs compatriotes.

Les alliés allèrent donc à sa rencontre. Elle était mouillée entre l’embouchure de la Piave et celle du Tagliamento. Le commandant de la flotte sarde avait ordre de l’attaquer partout où il la trouverait. Mais il hésita. Pourquoi ? Il était, avec les bâtimens amis, de beaucoup le plus fort. De son côté, l’amiral napolitain n’avait pas une entière confiance dans les véritables intentions de son souverain. On remit l’engagement au lendemain. La nuit vint et l’escadre autrichienne en profita pour se retirer. Le lendemain, elle était à Trieste et quand les navires italiens l’y trouvèrent, elle était fortement retranchée sous la protection de batteries de terre récemment élevées et qui eussent rendu le combat plus incertain. La marine italienne crut devoir rester sur la défensive. Elle prit position devant l’ennemi, mais ne chercha pas à le forcer dans sa retraite. L’occasion perdue ne se représenta plus, et à la paix, les deux escadres rentrèrent chacune de son côté, dans leurs ports, sans s’être fait aucun mal : expédition pacifique dont l’Autriche prit sa revanche à Lissa. La Prusse lui avait donné un coup de main en faisant intervenir la confédération allemande dans l’intérêt de la navigation de ses nationaux. À cette époque, la balance était indécise entre les deux partis et il n’était pas encore certain que les armes françaises la feraient pencher en faveur de l’Italie ! Autre temps ! autre politique ! Ce bon office rendu à l’Autriche contribua sans doute à circonscrire au moins l’action de la marine italienne qui, à partir de ce moment surtout, ne fit plus qu’une croisière inutile.

A la fin des hostilités entre la Sardaigne et l’Autriche, Albini dut abandonner Venise à son sort. Il y avait déjà longtemps que l’amiral Cosa avait quitté l’Adriatique. Dès lors Venise devait s’attendre à un blocus. C’était le cas de profiter, pour s’approvisionner, de quelques jours de répit. Cette précaution fut négligée, et la ville, assiégée par terre et par mer, se vit réduite à la famine. Elle avait entretenu à ce sujet des illusions malheureuses ; elle croyait qu’il suffirait de quelques bâtimens légers, appelés trabaccoli, qu’elle avait armés, pour recueillir des vivres le long de la côte. Mais elle fut bientôt désabusée, et les trabaccoli ne purent être utilisés que dans les lagunes, où ils concoururent à la défense des forts. Cette