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cinquante matelots, deux pièces de 4 et deux cents Mexicains auxiliaires qui formaient l’arrière-garde. Celle-ci se prononçant au moment du combat, M. Gazielle fut mis entre deux feux et toute sa troupe tuée ou faite prisonnière. Les Français pouvaient donc être battus. Presque aussitôt la moitié de la garnison d’Alvarado déserte ; elle part avec armes et bagages sous la conduite d’un sous-officier. Le reste (34 hommes environ) n’offrait aucune garantie et ne devait pas résister à une attaque un peu sérieuse. Medellin était serré de très près, et ce n’était plus le cas, comme y avait pensé quelque temps auparavant le maréchal, de retirer tout le service de la guerre de Vera-Cruz et de la Soledad. Galvez refusait de son côté d’aller au Yucatan et ne devait plus inspirer la moindre confiance. Il semblait évident qu’il ne voulait pas s’éloigner, afin de se prononcer contre l’empire au moment favorable, et sa troupe était alors une menace de plus pour les environs de Vera-Cruz. L’autorité mexicaine de cette ville laissait pour sa part circuler librement les guérilleros qui avaient récemment combattu les Égyptiens près de Medellin. Une pareille insouciance était une sorte de compromis avec l’ennemi, chose tout à fait ordinaire dans les mœurs mexicaines et qu’on n’eût réprimée que par quelques exemples sommaires et en soumettant le pays à la loi martiale. Mais le parti était pris des atermoiemens et de la patience, et on ne paraissait pas devoir y renoncer de sitôt. Il fallait que, dans ce moment-là, le commandant demandât au général L’Hériller, chargé des affaires militaires à Mexico, s’il n’avait pas un dictionnaire télégraphique marin pour le cas où il serait nécessaire d’expédier une dépêche chiffrée. En effet, on ne pouvait même se fier aux employés du télégraphe mexicain, qui communiquaient nos dépêches à l’ennemi. Il n’y avait pas à douter que les libéraux n’eussent depuis longtemps détruit le télégraphe, s’il ne leur eût servi comme à nous. Il en était de même du chemin de fer, que les bandes ne laissaient subsister que parce qu’elles prélevaient sur les administrateurs une redevance mensuelle.

On venait d’expédier la Tactique à Alvarado pour y porter les Égyptiens, que le commandant supérieur de Vera-Cruz, M. Maréchal, destinait à remplacer la garnison, lorsqu’on apprit l’échouage de l’Entreprenante à la Havane. Ce navire était parti depuis un mois pour ramener les créoles congédiés à la Martinique. Cet accident était d’autant plus regrettable que le Darien, chargé d’assister l’Entreprenante et de la reconduire au besoin jusqu’à New-York, ne pouvait plus concourir à l’expédition de Tabasco et diminuait par son absence de soixante-dix hommes l’effectif du corps de débarquement. Ainsi la situation était partout fort tendue, et depuis un mois les choses empiraient en quelque sorte à vue d’œil.

Dans le Nord, près de Durango, une conduite d’argent de près