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rivière avec un canot armé d’une pièce de 4 et quarante carabiniers surveillant des broussailles des deux rives. Le Tarn ramenait bientôt le bataillon, réduit de cinq cents hommes à trois cent vingt, sur lesquels cinquante à peine pouvaient porter leurs sacs, jusqu’au chemin de fer qui les emmenait dans l’intérieur. Passant d’un rapatriement de forces malades à un autre, le Tarn repartait aussitôt pour Campêche afin d’en ramener la garnison autrichienne également décimée. Comme il était probable que le maréchal ne tarderait pas à rappeler le bataillon Chopin, en quelque sorte bloqué à Tancasnequi, grand dépôt de marchandises de Tampico, il ne restait plus bientôt que la petite portion de la contre-guérilla Vollée pour défendre la ville, tout le reste du Tamaulipas étant aux mains de l’ennemi et la Huesteca en pleine révolte. Tel était l’état des provinces du littoral au nord de Vera-Cruz. De plus, le Michoacan était à peu près perdu, ce qui avait sa gravité, cette riche province étant contiguë à celle de Mexico. On avait pu croire qu’avant d’opérer dans le Nord, le maréchal avait songé à s’établir fortement dans le Tamaulipas, mais on voit qu’il y réussissait peu, et, à ce sujet, les opérations de l’armée de terre, à cette époque en particulier et en général pendant les dernières années de l’occupation, ne sont que marches et contre-marches, courses à fond de train, arrêts soudains, retours précipités. Aucun succès n’est décisif. Les bandes se dispersent et se reforment. Nos troupes harassées agissaient dans le vide, et un point était à peine occupé qu’il nous fallait l’abandonner et que l’ennemi le reprenait.

À cette situation si tendue on n’avait d’abord apporté que des palliatifs. Au sud, l’interdiction de navigation aux bâtimens mexicains avait été levée. Carmen avait reçu des promesses, on avait changé et quelque peu augmenté la garnison d’Alvarado. Au nord Tuspan était rouvert, mais c’était tout. Une indécision manifeste régnait à Mexico, autant au quartier-général que dans le gouvernement. L’empereur Maximilien, étranger dans un pays absolument nouveau pour lui, essayant de lui appliquer des réformes tout européennes et qu’il était peu apte à goûter, mal ou diversement conseillé, plus timide et plus homme du monde qu’énergique et doué des qualités d’un souverain, eût volontiers accepté l’entière et puissante tutelle du maréchal, si, plus franchement offerte et plus sérieusement dévouée, elle n’eût pas eu les singulières et inquiétantes oscillations qui la caractérisaient. Mais elle les avait, et, par suite, de légers et déjà sensibles dissentimens qui devaient bientôt s’envenimer d’une extrême défiance éclataient entre le jeune souverain et le maréchal. On comprend que l’administration, n’y gagnât pas davantage que la conduite des affaires militaires. D’ailleurs, l’administration mexicaine s’est toujours résumée et se