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certaines époques de l’année. Le problème des origines du Sahara, qui préoccupe si vivement les géologues, n’a point laissé la mission indifférente ; elle a confirmé une découverte qui rend inadmissible l’hypothèse consistant à considérer le désert comme une mer desséchée par un récent soulèvement qui en aurait élevé le fond au-dessus du niveau des eaux. Le sol du Sahara renferme des pointes de flèches en silex et des débris de la taille de ces flèches en quantité innombrable, preuve irrécusable de l’existence d’une population nombreuse qui trouvait un climat favorable à la vie dans des contrées qui semblent vouées aujourd’hui à une stérilité éternelle. La mission a recueilli à Ogla-el-Hassi des débris de taille de silex sous une incrustation gypseuse de 0m,60 déposée par des sources qui ont cessé de couler dès les temps géologiques. C’est sans doute le plus ancien témoignage de l’industrie humaine que l’on ait jusqu’à présent retrouvé.

Une expédition commandée par le colonel Flatters, que quatre ans de commandement à Laghouat ont familiarisé avec les questions sahariennes, a continué au-delà de Ouargla l’étude du tracé commencée par M. Choisy. Elle comprenait, outre M. Flatters, quatre officiers, un ingénieur de l’état, M. Beringer, un ingénieur des mines, M. Roche, le docteur Guiard, un conducteur des ponts et chaussées et un chef de section du cadre auxiliaire des travaux de l’état. L’élément militaire y était assez fortement représenté, comme on voit, et son emploi n’a justifié aucune des craintes qui avaient été exprimées un peu tragiquement dans la commission supérieure. Les populations ne se sont point soulevées, les puits n’ont point été comblés, les voies de communication n’ont pas été rendues impraticables, et l’expédition n’a pas rencontré d’autres obstacles que ceux que lui opposaient le climat et la nature du pays. Les officiers, obligés à des rapports quotidiens avec les indigènes, y acquièrent une connaissance de leur langue et de leurs mœurs qui se rencontre rarement parmi les civils, unie au savoir nécessaire pour l’étude des terrains. Il serait absurde que les mauvais souvenirs des bureaux arabes empêchassent d’utiliser ces précieux avantages dans l’exploration du désert. Là, plus que dans le reste de l’Afrique encore, les indigènes n’ont de respect que pour la force ; l’expédition, avec son escorte et ses chameliers, présentant une troupe de cent cinq hommes bien armés, personne n’a songé à inquiéter sa marche, et elle a trouvé auprès des tribus auxquelles elle a eu affaire une bonne volonté qui s’explique aisément par ceci, qu’elle était en état de tenir tête à n’importe quelle attaque et qu’elle accablait de cadeaux quiconque se présentait en ami.

Son but était de traverser de part en part le pays des Touareg