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pour justifier la construction d’une ligne d’intérêt local lui est assuré jusqu’à la frontière du Maroc par l’alfa et au-delà de la frontière du Maroc par une population de 750,000 habitans et une forêt de 10 millions de dattiers produisant 150,000 tonnes de dattes. Passé le Touat, les élémens d’appréciation manquent ; pourtant on est assuré déjà de ne point rencontrer de vide immense comme entre Ouargla et l’Aïr.

Si on s’en tenait au prix de revient et au trafic local, aucune hésitation ne serait permise, il ne saurait être question du tracé oriental. Mais il y a une autre considération, et capitale, celle du point où il est le plus utile de faire aboutir le Transsaharien. Les partisans du tracé oriental disent : Ce point, ce sont les riches royaumes du Soudan central, qu’il ne faut pas nous laisser enlever par une ligne allant de Tripoli au Bornou. Il faut que le Transsaharien aboutisse au Haoussa ; à quoi bon le faire aboutir au Niger, qui aura déjà un débouché par la ligne du Sénégal ? A notre avis, ils ont raison quant au point à atteindre. Mais de ce que le Transsaharien doit avoir pour but de desservir le Soudan central, il ne s’ensuit pas forcément qu’il doive passer par les plateaux dévastés des Touareg. Rien ne fait une nécessité d’arrêter le tracé occidental au coude du Niger ; de là on n’a qu’à le faire descendre par la vallée du fleuve pour le faire pénétrer dans le Soudan central. Prenez une carte et mesurez les distances. Sokoto est la capitale du grand empire qui occupe avec le royaume moins considérable de Bornou le Soudan central. Une ligne partant de Philippeville pour aboutir à Sokoto en passant par Ouargla, la Sebkha d’Amadghor, l’Aïr et Katsena, ce qui est, croyons-nous, le tracé le plus en faveur, aurait en chiffres ronds 3,000 kilomètres de longueur ; une ligne partant d’Oran et aboutissant à Sokoto en passant par l’Oued-Guir, le Touat, le coude et la vallée du Niger, n’en aurait que 70 ou 80 de plus, c’est-à-dire que la distance serait sensiblement la même. Pour les pays à l’ouest de la longitude de Sokoto, le tracé par le Niger aurait l’avantage d’une plus courte distance ; l’avantage appartiendrait au tracé par le Hoggar pour les pays situés à l’est, qui sont, il est vrai, les plus importans. Le problème qui se pose se résume donc ainsi. Le tracé oriental a pour lui d’être de 500 kilomètres plus court pour aller à Kano, à Kouka et dans le bassin du Chari ; contre lui de ne pouvoir compter dans un parcours de 2,200 kilomètres que sur un trafic local insignifiant, d’avoir à traverser 1,400 kilomètres d’un désert terrible, d’offrir des difficultés d’exécution plus grandes, d’être plus long pour atteindre les rives du Niger moyen, qui ne laissent point que d’être fort peuplées et fort commerçantes. Le tracé occidental a pour lui d’être assuré sur 1,100 kilomètres de parcours d’un trafic local