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les contractes qu’on désespère de les fixer. Tout le monde comprend d’ailleurs immédiatement ce qu’on entend ici par teinte ou nuance (la première, ou, suivant M. Rood, la troisième constante de toute couleur) ; il faut, au contraire, an certain effort de réflexion pour bien saisir là signification des deux autres constantes. L’éclat ou la luminosité d’une couleur dépend, comme nous l’avons dit, de l’intensité des rayons colorés qui répondent à sa teinte, et cet éclat est modifié par l’addition d’une certaine proportion de noir. Les couleurs ainsi rabattues peuvent aussi être obtenues en éclairant de moins en moins une surface peinte avec une couleur franche, ce qui prouve bien que le mélange avec du noir équivaut à une diminution d’intensité. Mais le mélange avec du blanc ne produit pas l’effet contraire, c’est-à-dire une augmentation d’intensité, comme on pourrait le croire et comme beaucoup de personnes l’admettent volontiers ; les couleurs blanchies ne sont nullement dés couleurs franches, plus intenses, plus lumineuses ; ce sont des couleurs impures, des couleurs imparfaitement saturées.

Le langage des peintres n’est guère conforme à cette manière de voir, et il peut en résulter quelque obscurité et quelque confusion. Ils disent d’une couleur qu’elle est lumineuse ou brillante simplement parce qu’elle rappelle à l’esprit l’impression de la lumière, et non parce qu’elle réfléchit beaucoup de lumière et l’œil. De même, ils emploient souvent le mot de pureté dans un sens très différent de celui que nous lui attribuons ici ; en disant qu’une couleur est remarquablement pure, ils entendent qu’elle n’est ni terne ni indécise, mais ils ne songent pas aux effets du mélange avec unie proportion plus ou moins forte de blanc. Si l’on adopte les définitions qui viennent d’être établies, i ! faudra donc, pour obtenir une classification rationnelle des couleurs, former d’abord un cercle Chromatique avec une série de teintes franches, distribuées sur la circonférence extrême en suivant l’ordre des couleurs spectrales, et dégradées successivement par des proportions croissantes de blanc depuis le bord jusqu’au centre, occupé par le blanc ; on aura ainsi tous les degrés de pureté des teintes normales, représentés par les « tons affaiblis » des cerclés chromatiques de M. Chevreul. Ensuite on formera une échelle des intensités au moyen d’une série de cerclés semblables, obtenus en rabattant le premier avec dû noir. On pourrait d’ailleurs, à mesure que les couleurs deviennent plus sombres, diminuer le diamètre des cercles successifs ; leur superposition donnerait alors un cône terminé par une pointe noire, et dont l’axe serait occupé par une gamme de tons gris, depuis le noir jusqu’au blanc. C’est le cône chromatique de Lambert, auquel nous ramènent, comme on voit, les théories les plus récentes et les plus rationnelles.

Comme types de couleurs franches, on prend toujours les teintes du spectre de la lumière solaire. Dans ces derniers temps, M. Vierordt a