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le 3 février 1865, au charbonnage du midi de Dour, à la profondeur de 468 mètres, et à 45 mètres du puits d’extraction. « Au milieu d’un calme apparent, le gaz a fait tout à coup irruption avec une violence telle que deux ouvriers occupés à l’avancement ont été renversés et entraînés vers le puits au milieu d’un torrent de poussière qui a envahi les excavations du voisinage et s’est rapidement élevé jusqu’à la surface en remontant par le puits d’extraction ; le grisou a pris feu à une lampe défectueuse qui se trouvait à l’étage de 443 mètres, et a fait périr tout le monde de ce niveau. En arrivant à l’orifice du puits d’extraction, il s’est aussi allumé à un petit foyer situé dans le bâtiment du puits, a fait sauter la toiture et a mis le feu au câble d’extraction… Le gaz et la poussière furent suivis de près par une masse considérable de houille broyée et comme tamisée qui vint encombrer le chassage sur une longueur de près de 30 mètres. Le mesurage de cette masse pulvérulente en a porté le volume à 1,718 hectolitres. Quant à la cavité ou poche qui s’est ainsi vidée et agrandie, elle affectait une forme irrégulière. La capacité de cette poche n’a pu être mesurée. Nous pensons toutefois qu’il n’y a rien d’exagéré à l’évaluer à 100 mètres cubes. Les témoins disent avoir rencontré subitement une coupe qui donna issue à une grande quantité de grisou et de poussière avec un bruit comme celui d’un coup de mine. Ils assurent qu’avant l’ouverture de la coupe, il n’y avait point de grisou dans la galerie et que l’aérage était bon. »

Nous avons dit que l’ouragan subitement déchaîné s’apaise peu à peu et cesse de lui-même après avoir versé dans l’atmosphère, par les puits, le grisou qui lui a donné naissance : dans ce cas, il n’a qu’une gravité relative et éphémère ; on en est quitte pour l’asphyxie des ouvriers qui ont crevé la poche ou de ceux que les gaz ont rencontrés en chemin, ce qui est déjà bien assez triste ; mais le sinistre prend les proportions les plus terribles quand il s’enflamme en chemin à un foyer ou à une lampe oubliée ; alors le malheur dépasse tout ce qu’on peut imaginer. C’est ce qui est arrivé à la mine de Lagrappe, à Frameries, le 17 avril 1879. La mine communique avec le jour par trois puits : l’un qui sert à l’extraction et par où pénètre l’air ; un deuxième, d’aspiration, muni d’un ventilateur ; un troisième puits contient les échelles. La mine a 620 mètres de profondeur. Le jeudi 17 avril, à sept heures trente-sept du matin, les ouvriers qui étaient à l’orifice du puits d’extraction en virent sortir un courant d’air très violent. Quelques secondes après, ce gaz, qui était du grisou pur, vint prendre feu au foyer de la machine à vapeur. Immédiatement la flamme descendit dans tout le bâtiment qui couvrait les puits, circonstance terrible qui empêcha les ouvriers de sortir. Une gigantesque colonne de feu dépassait le sommet de la