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Elles s’humilieraient d’elles-mêmes, à un moment donné, devant le pouvoir qui les aurait ménagées et qu’elles seraient appelées à élire. Maximilien, au contraire, était toujours le faible souverain dont il fallait dévoiler l’insuffisance et surveiller les actes. Lui disparu, la place se faisait nette et telle qu’on la voulait. Aussi, influençant, sans l’entraîner entièrement toutefois, l’esprit du maréchal, ces ambitieux à courte vue obtenaient de lui qu’il s’isolât du souverain dont la défense et la consolidation eussent dû être son premier soin. Ainsi, le maréchal avait ses chiffres particuliers pour expédier ses dépêches et interpréter celles qu’il recevait. Il voulait en effet que le gouvernement mexicain ne connût de sa correspondance que ce qu’il jugeait à propos de lui en communiquer. Il se faisait informer des moindres mouvemens des bâtimens que l’Autriche laissait à Vera-Cruz à la disposition de l’empereur. La Novara, qui avait amené Maximilien au Mexique, avait été remplacée par le Dandolo, corvette à batterie couverte de dix-huit canons. Le Dandolo allait-il à la mer à cause de l’état sanitaire peu satisfaisant de Vera-Cruz, le maréchal s’enquérait s’il n’était pas secrètement parti pour quelque mission diplomatique ou militaire inconnue et tenait à ce qu’on ne sût point qu’il demandait ces renseignemens. De son côté, Maximilien, non moins défiant, cherchait à connaître les actions et les projets du maréchal, et sur toutes les lignes télégraphiques il existait des embranchemens aboutissant à un bureau télégraphique du palais. Les dépêches adressées au maréchal arrivaient ainsi au cabinet de l’empereur en même temps qu’au quartier-général. On croit voir l’antagonisme de ces faibles prétendans qui s’épuisent l’un contre l’autre en luttes puériles, tandis que s’avance à grands pas l’ennemi qui doit prendre leur place.

Nous avons poussé aussi loin que possible le récit des événemens du Sud. Il nous faut maintenant revenir au Nord et passer par les mêmes alternatives de succès et de revers jusqu’à ce que la chute de Matamoros serve, pour ainsi dire, de signal à la défection et à la capitulation des autres villes du littoral du Mexique.

Tampico n’avait jamais cessé d’être plus ou moins inquiété. Au mois de janvier 1866, les libéraux, sous les ordres de Mendez, ayant réussi à tromper sur leur marche le commandant Chopin, du bataillon d’Afrique, et le capitaine Jacquin, de la contre-guérilla, avaient attaqué avec un succès complet les positions de Tancasnequi et de Tantoyuquita. La compagnie de cent cazadores, qui les défendait, avait été battue et avait perdu trente hommes. Les magasins de marchandises avaient été complètement pillés et incendiés. La perte s’élevait à 2 millions, et ce qu’il y avait de plus regrettable, c’est que nos conseils et nos assurances de protection