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Page:Revue des Deux Mondes - 1881 - tome 44.djvu/521

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LES PREMIERS JOURS
DE
L’ARMISTICE DE 1871

TROIS VOYAGES A VERSAILLES

Ces lignes ont été écrites il y a dix ans, au lendemain des grands désastres de la patrie. J’ai vu les personnages, entendu les paroles et les récits désintéressés, touché les faits dont elles sont uniquement remplies. Sans haine, protégé par l’expérience contre les illusions des amitiés politiques, indépendant, poussé par le goût de la vérité, malgré des répugnances légitimes pour un exposé public qui me constitue témoin et narrateur de mes actes, voici devant le lecteur l’affirmation de ce qui me paraît utile à dire.

Les souvenirs d’un passé douloureux ne doivent-ils pas être rappelés et connus? L’histoire vraie n’est-elle pas l’expérience sage? Les désespoirs de la défaite et les amères souffrances du vaincu peuvent d’ailleurs trouver aujourd’hui une large consolation. Courageusement cherchée et obtenue, la paix a rendu à la nation la prospérité matérielle, des finances sans rivales, surtout une armée laborieuse, instruite, disciplinée, debout. Quelle ambition oserait troubler notre grande lutte pacifique du travail? Quel discours pourrait demander utilement à la république d’employer les enfans de la patrie à une guerre qui n’aurait pas pour objet l’honneur et l’intérêt propre de la France encore mutilée?