un gallon (4 litres 1/2) de vin ; en Suisse, dix livres suffisent pour faire la même quantité. Ces deux livres pesaient trop lourdement sur des hommes qui éprouvaient inconsciemment la lassitude d’une grande œuvre accomplie dont ils n’avaient ni les gloires, ni les joies, car leur directeur, Dufour, savait seul que, sous le nom de cape constantia, il avait civilisé la vigne américaine. L’œuvre de cette industrieuse colonie fut continuée par des hommes nouveaux qui cherchèrent la solution du problème dans l’essai d’autres variétés indigènes et dans l’hybridation de ces variétés avec le vitis vinifera, la vigne asiatique, répandue en Europe. Maintenant que le phylloxéra a compliqué le problème et qu’il faut, outre la qualité, la résistance, ces essais d’hybridation ont dû s’appliquer aussi aux vignes indigènes entre elles. Avant d’énumérer les variétés essayées, abandonnées ou conservées, examinons une question devenue industrielle et inséparable de l’existence même de cette vigne nouvelle : il s’agit désormais de la créer assez abondante pour suffire aux plantations dont l’urgence, aujourd’hui méconnue, ne tardera pas à apparaître aux yeux les plus aveuglés par des espérances chimériques ou par une fausse sécurité.
Revenons pour un moment en Europe et comparons entre eux les procédés de multiplication de l’ancien et du Nouveau-Monde.
La vigne européenne se reproduit facilement par simples boutures ; le vigneron se procure ainsi les jeunes plants dont il a besoin et il emploie les provins pour remplacer les manquans dans les vieilles vignes. — Le contraire, est le vrai en Amérique ; la bouture longue ou ordinaire n’est possible que pour certaines variétés inférieures. Le marcottage ou provignage est difficile et dispendieux pour les bois rares ; le semis est un moyen de trouver de nouvelles variétés qui a sa raison d’être, parce que les bonnes variétés sont encore imparfaites et rares et que l’Américain, novateur dans l’âme, commerçant jusque dans la moelle des os, trouve dans d’incessantes créations un moyen d’alimenter et d’animer le marché. — De ces fabriques, si l’on peut appeler ainsi des établissemens horticoles, il sort des prospectus incroyables, invraisemblables, et l’on s’étonne, à côté des merveilles décrites et prônées, de voir subsister des variétés dont l’oraison funèbre a été prononcée depuis des années. Ainsi le catawba, né en 1820, qu’Husmann[1] cite dès 1866 comme devant être relégué au musée des souvenirs, entre encore en 1879 pour 7/8 dans les 1,000 tonnes de raisins pressés à Kelley-Island (lac Erié), et nous lisons dans les annonces de 1880 : sparkling catawba, dry catawba, etc., à 1 et 2 dollars le gallon. Je crois
- ↑ The Culture of the native grape, by Hosmann ; New-York, 1866.