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VOYAGE EN SYRIE

IMPRESSIONS ET SOUVENIRS

IV. — LE SAINT-SÉPULCRE.

Si l’aspect général de Jérusalem inspire aux âmes délicates une profonde tristesse, la vue de la basilique du Saint-Sépulcre augmente encore cette impression. Bien qu’il ait l’air écrasé et en quelque sorte mutilé, l’édifice lui-même ne manque pas d’une certaine grandeur. La description en a été faite cent fois par les hommes les plus compétens : on sait que l’architecture est un composé du style roman et de l’ogive sarrasine ; l’extérieur offre des parties remarquables ; quant à l’intérieur, il est tellement déformé par d’horribles ornemens qu’on ne saurait y rencontrer la moindre trace de beauté. Rien n’est plus affreux que l’édicule du Saint-Sépulcre ; c’est la plus grossière des bâtisses : œuvre des Grecs qui l’ont gâtée à plaisir, il a tout ce qu’il faut pour comprimer l’émotion prête à s’éveiller en face du lieu, même apocryphe, où Jésus aurait reposé. Placé au centre de la grande coupole, ses proportions massives, sa forme lourde et gauche, l’espèce de lanterne qui le domine, les tableaux ridicules, les fleurs, les lampes innombrables qui le recouvrent, tout contribue à en faire un monument gauche, désagréable, presque répugnant. Cet édicule est quadrangulaire : une de ses faces, qui sert de façade, est divisée en trois parties appartenant l’une à la communauté latine, la seconde à la communauté grecque, la troisième à la communauté arménienne. Les trois communautés ont rivalisé de mauvais goût, dans l’arrangement de leurs parties respectives, et je n’oserais dire laquelle l’a emporté. Cette façade du Saint-Sépulcre,