budgets suivans, des diminutions de recettes ou même des dépenses qui auraient dû être couvertes par les ressources de ces exercices. A partir de 1875, la chute est rapide : le budget de 1876 ne présente plus qu’un excédent de recettes de 75 millions ; cet excédent descend à 19 millions pour 1877, à 5 millions et demi pour 1878, à 1 million pour 1879, et le budget de 1880 fut présenté par M. Léon Say avec un excédent de recettes présumé de 1,645,000 fr.
Cet abandon si prompt et si complet du plan de M. Thiers se justifie-t-il par la survenance inattendue de dépenses obligatoires, par quelqu’une de ces nécessités publiques devant lesquelles toute autre préoccupation doit céder ? Non, dans cette période, la France n’a été frappée par aucun désastre et n’a pas eu de guerre à soutenir. On ne peut invoquer davantage l’affaiblissement du rendement des impôts. Non-seulement les diverses sources du revenu public ont donné, chaque année, les produits prévus par l’administration des finances ; mais les recettes réalisées ont présenté sur les recettes prévues des plus-values qui ont toujours été en croissant, et qui du chiffre de 30 millions se sont élevées à celui de 100 millions pour les derniers exercices. A défaut des ressources qu’on cessait d’inscrire au budget, ces plus-values mettaient encore à la disposition du gouvernement des sommes importantes qui auraient pu être appliquées à l’extinction graduelle du fonds de liquidation ou à l’amortissement de la dette. Pas un centime de ces rentrées imprévues, on pourrait dire inespérées, n’a reçu cette utile affectation. Tout a été absorbé par le rapide développement des dépenses improductives et par la progression constante des crédits supplémentaires et extraordinaires qui, pour l’exercice 1877, ont atteint et même dépassé le chiffre inouï de 87 millions.
Ces crédits, inconnus en tout autre pays, ont toujours été la plaie des finances françaises. Ils sont ouverts par de simples décrets, sans justification préalable, et ils mettent à la disposition des ministres des sommes souvent très considérables imputées sur les excédens éventuels de recettes, et sur ce qu’on appelle, par un euphémisme administratif, les ressources de la dette flottante ; ce qui veut dire que le gouvernement se les procurera par la voie de l’emprunt, au moyen de l’émission de bons ou d’obligations du trésor. Ces ouvertures de crédit doivent recevoir l’approbation législative ; mais lorsque la loi destinée à les ratifier est portée devant les chambres, la dépense est faite, le ministre responsable a souvent cessé de faire partie du gouvernement : placé en face de faits accomplis et irrévocables, le pouvoir législatif n’a plus sa liberté d’action et, le plus souvent, il sanctionne sans discussion des dépenses que peut-être il n’aurait pas autorisées si son consentement lui avait été demandé en temps utile. Ouverts arbitrairement et dépensés sans