Page:Revue des Deux Mondes - 1881 - tome 47.djvu/216

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rendent impossible tout accès de chariots en hiver. » — « Le chemin de Provins à Bray est très mauvais presque en tout temps : il est bien nécessaire de le rendre praticable, parce qu’il sert au commerce de la Brie avec la Bourgogne... La chaussée des Ormes à Bray est entièrement rompue... Dans le village de Bazoches, il y avait un pont de pierre de trois arches qui est ruiné, à la réserve d’une arche qui ne suffit pas pour le cours de la rivière, en sorte que les eaux remontent et inondent le village. » Un ou deux ans après, l’intendant de Paris revenait à la charge et signalait au contrôleur-général l’état des chemins. « La plupart, disait-il, sont si mauvais qu’on y voit tous les jours des voitures, des chevaux et des bœufs embourbés et souvent même il y en a qui périssent[1]. »

L’année suivante, un effort fut accompli ; sous la pression de la misère publique, des chantiers furent ouverts et l’éditeur nous donne un état des dépenses qui furent effectuées dans la généralité de Paris pour le rétablissement des ponts et chaussées (page 684).

M. de Boislisle, qui a fait une étude spéciale des projets de Vauban sur la Dime royale, a réuni dans l’appendice un grand nombre de documens sur les impôts perçus dans la généralité de Paris, sur les abus de la perception et sur les tentatives avortées de statistique foncière qui ont précédé à un siècle de distance la vaste opération du cadastre. Le projet de dénombrement des biens-fonds en 1712, l’enquête sur la valeur des terres et la qualité des propriétaires en 1717, se rapportent au désir d’expérimenter la taille proportionnelle, telle que la réclamaient les économistes. On prit la généralité de Paris pour cet essai, et les commis-maires y travaillèrent toute une année à grands frais. Le savant éditeur nous donne en appendice un des procès-verbaux tels qu’ils sont conservés dans les papiers du contrôle-général.

A côté de ces documens officiels figurent plusieurs lettres et mémoires de Boisguilbert qui sont d’un grand intérêt pour l’histoire de cet économiste. Lieutenant-général de Rouen, il demandait alors une intendance et mêlait à l’exposition de ses doctrines économiques les prières d’un solliciteur habile. Il insistait surtout sur le poids des impôts qui ruinent l’agriculture; il montrait dans des peintures saisissantes l’abandon de la vigne dans des pays qu’avait jadis enrichis la production du vin; à l’aide de calculs précis, il prouvait que l’élévation des droits avait seule paralysé la culture du raisin. Rapprochés des descriptions d’une province à diverses époques et des états des recettes fiscales, les mémoires de Boisguilbert jettent sur ces questions une lumière toute nouvelle.

Ces visites d’une province et les rapports qui en résultaient ont

  1. Lettre de l’intendant de Paris, 13 décembre 1699. Appendice, page 561.