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Page:Revue des Deux Mondes - 1881 - tome 47.djvu/587

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parabole s’il passe moins loin. Plus près encore il sera ramené sur lui-même, tournera autour du soleil comme une fronde autour du centre : ce sera une planète; le calcul prouve qu’elle suivra le contour d’une ellipse ou d’un cercle, qu’elle le parcourra avec des vitesses croissant vers le périhélie et diminuant à l’aphélie, et que les durées des révolutions croîtront comme le veulent les lois de Kepler. L’attraction est donc la grande loi universelle et la régulatrice du système solaire.

C’est au milieu de ce monde planétaire si bien réglé, où chacun a sa place et parcourt silencieusement sa route sans gêner son voisin, que nous voyons apparaître à l’improviste de temps à autre les comètes, ces astres singuliers qui semblaient aux anciens traîner une longue chevelure et menacer le monde de malheurs inévitables. Aristote les croyait formées des vapeurs émanées de la terre. Sénèque en avait une idée plus juste ; il croyait qu’elles viennent de loin, des profondeurs du ciel, et qu’elles y retournent; il annonçait qu’un jour on les connaîtrait mieux. « Un âge viendra où ce qui est un mystère pour nous sera dévoilé par le travail accumulé des siècles ; un homme naîtra qui dira d’où elles viennent, pourquoi elles diffèrent des autres planètes, quelle est leur grandeur et leur nature... » Prévision bien étonnante pour l’époque et que le temps s’est chargé de réaliser comme une prophétie au XVIIe siècle. Seulement, au lieu de l’homme unique prédit par Sénèque, il en naquit deux qui devaient se compléter mutuellement. Newton et Halley. Voici d’abord la part de Newton.

Ce qu’on nomme la science est une conquête de l’esprit humain ; elle se fait lentement et laborieusement par le concours de tous et procède toujours de la même manière. Elle commence par l’observation des faits particuliers, puis elle les groupe, résume leurs conditions communes, en un mot découvre les lois plus ou moins générales qu’ils suivent, enfin s’élevant toujours du particulier au général, découvre un principe qui embrasse toutes les lois, tous les faits d’observation. Alors la science est faite, puisqu’on peut redescendre du général au particulier, expliquer et calculer les lois et les faits et résoudre tous les problèmes qu’on rencontre. Or Newton avait résumé l’astronomie tout entière dans l’attraction, ce fut sans hésitation ni incertitude qu’il en fit l’application aux comètes. Ce sont des masses matérielles venant en ligne droite des espaces lointains vers notre monde; elles sont de toute nécessité déviées par l’attraction du soleil et doivent décrire l’une des trois formes d’orbite que cette attraction commande: venues lentement, elles doivent décrire des cercles ou des ellipses et devenir de vraies planètes; plus vite elles seront simplement déviées et parcourront des paraboles ou des hyperboles; or, comme, suivant les idées