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les quarzites roulés de la Vallouise, entraînés de plus de 60 lieues, ont cependant jusqu’à 0m, 40 sur leur plus grand axe. Leur forme ovoïde, un peu aplatie, leur poli parfait, les font aisément reconnaître.

Voilà donc d’énormes fleuves. Le Var, maintenant si chétif, avait les mêmes allures, et telle rivière des plus secondaires aurait alors étonné par le débit de ses eaux. De là pour celles-ci la nécessité de ronger et de franchir les obstacles et, jusqu’au moment où les barrières purent être percées, de refluer en amont, en formant des lacs ou des réservoirs profondément encaissés. À ces eaux courantes venaient se joindre des sources qui, à raison de leur volume, jaillissaient à un niveau bien plus élevé que les filets d’eau qui les remplacent et qu’on observe le plus souvent en contre-bas de l’ancien point d’émergence.

On peut juger de l’abondance de ces sources par la puissance des calcaires concrétionnés qu’elles ont laissés et qui constituent des escarpemens, des nappes et des terrasses en complète disproportion avec la faiblesse des eaux qui coulent maintenant encore aux mêmes lieux. Une foule de points en France, comme en Allemagne et en Italie, témoignent de cette action des sources quaternaires, et nous devons à ces mêmes sources des empreintes qui permettent de reconstituer le tableau des plantes et des mollusques vivant à leur portée. Certaines localités sont devenues célèbres par de semblables formations. Les tufs de Moret, près de Fontainebleau ; ceux de Canstadt, dans le Wurtemberg; ceux de Provence et des environs de Montpellier ; ceux de Massa-Maritima, en Toscane ; de Lipari, dans l’île de ce nom, ont fourni un grand nombre de plantes fossiles; mais tous ne sont pas explorés, et ce qu’on ne saurait passer sous silence, c’est l’extension et la distribution de ces sources calcarifères. Au-delà de la Méditerranée, on les retrouve dans toute l’Algérie et jusque dans le désert de Tripoli. On saisit par les traces incontestables de leur présence les indices d’un phénomène qui se répétait sur une vaste étendue géographique, du nord de la France et de l’Allemagne du Sud aux confins du Sahara, du cœur de l’Italie au centre de l’Espagne et à l’ouest du continent. En dépit des différences qui établissent, de nos jours, tant de contrastes entre ces divers points, partout alors des sources intarissables épanchaient leurs eaux chargées de calcaire en dissolution, attestant la présence d’un ciel assez pluvieux pour les alimenter. Ces sources, remarquons-le encore, se montrent exclusivement dans les régions soustraites à l’envahissement des glaciers, en dehors de leur ancien périmètre. Leurs dépôts se rencontrent au sud de l’Allemagne, au nord et. dans l’ouest de la France, dans la vallée inférieure du Rhône, dans l’Italie centrale et en Algérie, c’est-à-dire sur tous les points