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Page:Revue des Deux Mondes - 1881 - tome 47.djvu/865

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d’avant en arrière, un surbaissement de la voussure qui dépassent les limites ordinaires. Le front est fuyant ; les arcs osseux qui répondent aux sourcils ont une saillie parfois énorme. En combinant les crânes avec les mâchoires trouvées dans les mêmes conditions, on constate le prognathisme de la région alvéolaire, la présence d’incisives petites et serrées qui contrastent avec la grosseur des canines développées d’avant en arrière, enfin une progression croissante du volume des molaires, très rarement observée chez l’Européen de nos jours. En même temps, l’épaisseur des os du crâne est inusitée; les impressions qui se rapportent aux circonvolutions cérébrales sont faibles et pauvres. Au total, ces têtes dénotent un type certainement humain, marqué par un développement des régions instinctives aux dépens de celles où domine l’intelligence pure, plus particulièrement du front. La bouche projetée en avant, la saillie des arcades sourcilières, ajoutent sans doute à l’expression farouche que devait avoir une semblable physionomie jugée d’après nos idées et alors que des milliers d’années ont ennobli les traits de l’homme, en atténuant les parties du visage qui relèvent des appétits, pour agrandir celles qui servent de siège à la pensée. Cependant, parmi les crânes « dolichoplatycéphales, » celui de l’Olmo et celui de Clichy paraissent être féminins et dénotent moins de rudesse et des saillies moins accusées dans les os de la face. Au contraire, le crâne du Néanderthal a toujours étonné par l’énorme saillie de ses arcs sourciliers, qui paraissent même]une exagération de ceux qui caractérisent la race. Les savans français retrouvent les mêmes caractères ethniques, très nettement prononcés, dans les restes d’hommes trouvés ensevelis au fond des cendres volcaniques du Velay; ils appartiennent par cela même à un âge où les volcans de cette partie de l’Auvergne étaient encore en pleine ignition.

Ce type crânien, dont l’infériorité relative est tellement-visible, les savans français l’assimilent avec raison à celui qui distingue certains Australiens du Sud des alentours d’Adélaïde et qui s’écarte justement du plan céphalique le plus ordinaire de la région. On le retrouve peut-être encore chez quelques tribus de Négrites, perdues au sein des montagnes de l’Inde centrale. Mais si le type de Canstadt ne saurait se montrer à l’état normal que chez les races actuelles les plus dégradées, il est loin d’être inconnu en Europe à l’état sporadique et à titre d’exception locale ou individuelle. Dans d’anciennes sépultures, en Irlande surtout, sur une foule de points, on en rencontre des exemples, et Paris, même de nos jours, en laisserait voir à l’observateur attentif. Un crâne historique, celui de saint Mansuy, évêque de Toul, reproduit trait pour trait la configuration de ceux d’Eguisheim et du Néanderthal. Faut-il croire à une récurrence atavique, suite du mélange des races, qui ramènerait