Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1881 - tome 47.djvu/868

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tufs de Moret avaient offert le laurier, le figuier, le gainier, exclus plus tard des environs de Paris. Tandis que les éléphans et les rhinocéros se font plus rares, le renne, au contraire, tend à se multiplier, preuve évidente que le climat, devenu plus froid, favorise ce dernier. D’autre part, l’ours des cavernes, l’hyène, le lion, trouvent dans l’accroissement des troupes de ruminans et d’équidés une proie plus abondante et plus facile que précédemment. L’homme enfin, celui dont nous avons signalé l’industrie et les traits physiques, les habitudes de vie à l’air libre, celui des silex de Saint-Acheul, la race dolichoplatycéphale de Canstadt, est elle-même atteinte ; elle disparaît, peut-être aussi se transforme-t-elle, et, pour résister à des conditions plus rudes, qui tendent à s’aggraver de jour en jour, va-t-elle se réfugier dans le fond des cavernes, pour y vivre assez misérablement et périr au premier contact qu’elle aura avec une race plus jeune et plus forte. En effet, c’est peut-être là la signification de cet «âge du Moustier » proposé par M. de Mortillet, que M. Lartet avait désigné sous le nom pi as impropre « d’âge de l’ours des cavernes » et qui montre de nouveaux instrumens, tantôt épars à la surface, tantôt laissés dans des cavernes visiblement habitées, dont celle du Moustier est le type. Ces instrument plus petits, plus grossiers que ceux de l’âge précédent, obtenus par éclats et taillés sur une seule face, sont, pour ainsi dire, un prolongement dégradé de l’industrie acheuléenne.

Quoi qu’il en soit de cette dernière appréciation, il est juste, en s’ acheminant vers la fin du quaternaire, de distinguer un âge de transition, pendant lequel le mammouth et le rhinocéros, encore présens, mais moins multipliés qu’auparavant, se trouvent associés aux instrumens du type du Moustier, tandis que les glaciers s’arrêtent et commencent leur mouvement de retrait et que la flore perd de son opulence, le climat européen devenant plus inégal et plus froid. Cet âge pourrait bien être celui que M. Gaudry désigne sous le nom de « diluvium » et qui, d’après lui, serait caractérisé par la fonte d’une partie des glaciers, l’extension des fleuves, par conséquent des alluvions et des prairies. Pour pénétrer dans l’âge suivant, celui du renne proprement dit, nous n’avons qu’à signaler la continuation du même mouvement de retrait des glaciers, de différenciation des saisons, de sécheresse et de froid relatifs étendant à l’Europe entière les conditions propres à un climat extrême et continental. Ce dernier âge a été fort long; il a vu les glaciers reprendre en sens inverse le chemin qu’ils avaient suivi pour se projeter en avant. Il a vu une race d’homme très distincte de la précédente et certainement plus élevée en intelligence, envahir et peupler l’Europe ; il a vu les grands pachydermes, devenus très rares, se réfugier au fond de certaines forêts, puis s’éteindre totalement, peut-être